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Page:Ramuz - La grande peur dans la montagne, 1926.djvu/235

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DANS LA MONTAGNE

Et alors il a commencé à voir aussi avec ses yeux la solitude qui venait, quand, la lumière s’étant accrue, il n’y a plus eu que des pierres et que la neige, autour de lui.

Cette fois, il fallait quand même qu’il fasse attention. Un léger accroissement venait de se faire encore dans la lumière : il voit qu’il venait d’entrer dans une région de brouillard, l’ayant percé d’en dessous avec sa tête ; il voit qu’il était arrivé à un étage où l’air libre ne régnait plus. Là, il a commencé à se mouvoir dans une matière jaunâtre, qui collait à lui, qu’il devait déchirer pour avancer, qui pendait après son bras quand il le tendait ; et il avait les pieds dans des feuilles d’ardoise rendues noires et brillantes par l’eau d’une petite source, qui s’est trouvée sur son chemin. On n’a connu ici l’apparition du soleil qu’à une petite différence dans l’éclairage, au lieu que sur ces hautes crêtes on est frappé généralement par le soleil, quand il paraît, comme avec le poing, sur le côté de la figure et à l’épaule. À peine si Joseph voyait à trente pas devant lui, bien qu’il se trouvât avoir atteint les passages les plus difficiles, dans les hautes parois qu’on prend en travers, et la pierre qui vous roule sous le pied