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Page:Revue de métaphysique et de morale, supplément 5, 1908.djvu/6

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stances avaient amené l’auteur à rédiger. Pour l’histoire des sciences, on y lira : 1° deux leçons d’ouverture, (1883 et 1891), et un exposé des titres de 1903 pour une candidature au Collège de France, qui constituent les aperçus les plus fermes et les plus lucides que l’on ait donnés des rapports entre la science et la philosophie, entre l’histoire et la spéculation. 2° Un chapitre de l’histoire des mathématiciens et des physiciens français dans la première moitié du xixe siècle (il avait été écrit pour le Recueil de Petit de Julleville : Histoire de la langue et de la littérature françaises, mais malheureusement, il demeure inachevé), qui donne l’idée de la maîtrise où Hannequin avait atteint, historien et savant servi par des dons exceptionnels d’écrivain et de penseur. 3° Un article sur les nouvelles géométries à propos de la deuxième Année philosophique (1892). — Nous n’insisterons pas sur la partie concernant la philosophie. En dehors d’une analyse à la fois complète et concise de la philosophie de Hobbes, et d’un très remarquable fragment d’une étude sur Spinoza, qui sont inédits, on y trouvera la rédaction française de la thèse latine sur la première philosophie de Leibniz (1895), la conférence de 1898 : Notre détresse morale et la moralité, dont nous avons signalé en leur temps l’importance et l’originalité. On trouvera aussi des études que notre Revue a publiées soit dans les numéros consacrés à Descartes et à Kant, soit dans le numéro de novembre 1906 : nous sommes assurés que nos lecteurs n’en ont pas perdu le souvenir. Signalons enfin un article d’ensemble sur le neo-criticisme (1891) ; et ajoutons que nous aurions aimé à retrouver également la belle préface que Hannequin avait écrite quelques mois avant sa mort pour une nouvelle traduction de la Critique de la Raison pure ; cette préface marque l’orientation que la pensée d’Hannequin avait prise, dans les dix années qui suivirent la publication de sa thèse, et qui, comme le fait observer M. Grosjean, l’éloignait insensiblement de Leibniz pour le rapprocher de Kant. En tête de ces deux volumes posthumes, M. Thamin a écrit une préface, et M. Grosjean une introduction, dont les parties essentielles ont paru dans notre numéro de mars 1907. L’un et l’autre ont loué tans réserve le philosophe, le professeur et l’homme, sans qu’aucune parole nous ait paru dépasser la mesure du mérite d’Arthur Hannequin.

Les Savants et la Philosophie, par Gaston Rageot, 1 vol. in-16 de 179 p., Bibliothèque de philosophie contemporaine, Paris, Alcan, 1908. – La philosophie est toujours une réflexion sur la science. « Elle n’a pas sa source en soi ; elle ne peut s’élever que sur des fondations déjà prêtes ». Et, comme la science change, la philosophie vieillit vite ; par exemple la philosophie de Kant ne peut plus, selon notre auteur, être prise au sérieux : « les philosophes n’ont point le don d’observer les faits : même lorsqu’ils font le louable effort d’en chercher un comme appui, il leur arrive de l’interpréter mal. Ainsi Kant est allé trop vite, et s’est mépris sur le vrai caractère de la science » ; « il n’est même pas sûr que soit close aujourd’hui cette série de spéculations par lesquelles on a tenté de modeler, sur la réalité de l’expérience positive, la morne armature des catégories ». On voit que M. Rageot s’est mis a la mode.

Ces réflexions, et d’autres du même genre, servent d’introduction à quatre études sommaires. La première est sur Herbert Spencer : « Nous découvrons chez Spencer une des illusions de l’esprit moderne ». « Il a cru que la science pouvait lui fournir d’emblée une connaissance assez sûre et assez compréhensive pour supporter la philosophie ». N’insistons pas. Il est facile de vaincre Spencer, et de conclure que c’est Kant qui est vaincu.

La seconde étude a pour objet les travaux philosophiques de l’illustre H. Poincaré. On devine e que peut être un résumé d’une centaine de pages où défilent Fresnel, Maxwell, Cauchy, Kant, Newton, autour de Poincaré, dans un pittoresque désordre. On prévoit l’effet que produira, sur un lecteur ignorant, des questions de ce genre : « l’espace est-il plan, comme on l’a toujours enseigné ? » (p. 72). Bref, on nous prouve, en cent pages, que notre science n’est qu’un système de relations : le lecteur est vite instruit.

La troisième et la quatrième étude (les résultats de la psycho-physiologie. La métaphysique de la psychologie), sont certainement plus claires et plus instructives que la troisième. Dans la dernière étude, la philosophie de M. Bergson est une fois de plus résumée et jugée : « devant ce progrès harmonieux, en présence de ce thème unique repris sur tant de variations heureuses, on à l’impression d’une belle phrase musicale ». Notre auteur, on le voit, ne prétend pas plus inventer des métaphores que faire la mode. Il suit la mode ; c’est tout ce qu’on en peut dire.

Le Pragmatisme, par Marcel Hébert,