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Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 1.djvu/472

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VARIÉTÉS.

se réparer. Couché sur le côté, il avait eu le malheur de subir pendant vingt-quatre heures la violence d’un raz-de-marée qui l’avait porté plus haut sur la plage, et en partie rempli de sable. Quelle nuit encore que celle où toute communication avec la terre étant interrompue, les lames qui arrivaient du large en déferlant soulevaient la corvette par son arrière, et, la laissant retomber de tout son poids, menaçaient à chaque coup de l’abîmer et de la faire disparaître !

La nécessité dans laquelle nous avions été de pomper constamment pour l’emmener jusque là ne nous avait permis de sauver que fort peu de biscuit. Le reste nous revint mouillé par la mer et mélangé avec mille saletés. Ce fut notre nourriture des premiers instans.

Les personnes qui exploraient les environs tuèrent sur les bords d’un petit étang un énorme phoque qui semblait accablé de vieillesse, et s’y être retiré pour y mourir. Ce monstre marin du poids de deux mille livres, fournit pendant quelques jours un aliment gras et huileux, dont plusieurs de nous furent incommodés. Quand nous n’avions rien autre chose à manger, on envoyait enlever à la pièce la quantité de viande nécessaire à tout l’équipage. Dans ces contrées à température fraîche, elle se conserve assez long-temps à l’air sans altération et sans être souillée par des insectes qui n’existent pas dans l’île.

Cependant on portait à terre tout ce qu’on pouvait retirer du navire. Un camp fut établi à quelques pas du rivage derrière des dunes de sable, non loin d’un ruisseau. Avec les mâts et les voiles, on dressa des tentes pour l’équipage, les maîtres, l’état-major et le commandant. Le même ordre qu’à bord régna dans cet arrangement, et chacun de nous se maintint dans ses rapports respectifs. Nous n’avions point de précautions à prendre contre les naturels et les bêtes féroces ; et la discipline qui existait naturellement indiquait que nous n’aurions pas à nous prémunir contre nous-mêmes : du moins tant que nous trouverions assez d’alimens pour vivre en commun.

Cette île avait autrefois été habitée. Bougainville, le pre-