Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 4.djvu/106

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
102
REVUE DES DEUX MONDES.

voix forcenée, des bourreaux et des supplices. M. Villèle, cette fois, eut le courage de ne pas prendre part à tous ces débats ; il ne se prononça ni pour le voile noir, ni pour le voile rouge qu’on devait jeter sur la tête du supplicié ; il ne demanda ni la section du poing, ni la torche expiatoire, et s’en alla tranquillement, pendant toute cette orgie législative, disputer sa loi de conversion de rentes à la chambre des pairs. On aime à retrouver M. Villèle dans sa situation naturelle, et ne forçant pas son caractère. Il avait fait assez pour la congrégation d’ailleurs, elle ne pouvait plus douter de son zèle.

M. Villèle songeait cependant à se débarrasser de la congrégation. Il avait trop de sens et d’esprit, pour ne pas voir que la France finirait par se lever tout entière contre ce système d’asservissement religieux auquel on tentait de la soumettre, et il réfléchit sérieusement aux moyens de rester encore debout au milieu des ruines qui se prépareraient autour de lui. Son collègue Frayssinous, emporté par une sainte fureur, avait avoué à la chambre l’existence d’un certain nombre de congrégations jésuitiques, et toute l’opposition libérale s’était emparée des aveux du ministre des affaires ecclésiastiques pour animer le pays contre ce ministère de mensonge, qui avait toujours nié l’existence des jésuites. Un second mémoire de M. de Montlosier, accompagné d’une dénonciation devant les cours royales, parut alors, et quelques personnes, qui voyaient fréquemment M. Villèle à cette époque, crurent savoir qu’il ne fut pas étranger à ces publications. À qui plus qu’à M. Villèle pesaient la congrégation et les jésuites ? Ils avaient toujours étendu la main sur lui, mais jamais ils ne l’avaient appuyée aussi rudement. Chaque jour, ils lui demandaient de nouvelles concessions, et il devait se trouver trop heureux quand ils n’exigeaient que des concessions secrètes, et non de ces démarches éclatantes qui le menaient si rapidement au moment de sa chute. Un de leurs délégués, M. Renneville, était établi jusque dans son cabinet, comme ces émissaires des tribunaux secrets du moyen âge, qui forçaient les grands coupables à les prendre sur la croupe de leur cheval et à les admettre dans leur lit. Faut-il s’étonner que M. Villèle ait cherché à s’affranchir de cette tutelle ? Le mémoire de M. de Montlosier, en appelant la décision des chambres sur cette question, devait renverser la