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MÉTELLA.

ne pouvoir retrouver dans son nécessaire une certaine savonnette au garafolo qu’il avait achetée à Parme, lorsque le comte de Buondelmonte entra dans sa chambre.

— Pardonnez-moi si j’entre en ami sans me faire annoncer, lui dit-il d’un air riant et ouvert ; j’ai su en bas que vous étiez éveillé, et je viens vous chercher pour déjeuner avec moi chez lady Mowbray.

Olivier s’aperçut que le comte cherchait dans ses yeux à deviner l’effet de cette nouvelle. Malgré sa candeur, il ne manquait pas d’une certaine défiance des autres ; il avait en même temps une honnête confiance en son propre jugement. On pouvait l’affliger, mais non le jouer ou l’intimider.

— De tout mon cœur, répondit-il avec assurance, et je vous remercie, mon cher compagnon de voyage, de m’avoir procuré cette faveur. Maintenant nous sommes quittes.

Les manières cordiales et franches de Buondelmonte ne se démentirent point. Seulement, comme le jeune étranger, tout en se hâtant, donnait des soins minutieux à sa toilette, le comte ne put réprimer un sourire qu’Olivier saisit au fond de la glace devant laquelle il nouait sa cravate. — Si nous faisons une guerre d’embûches, pensa-t-il, c’est fort bien, avançons. — Il ôta sa cravate, et gronda son domestique de lui en avoir donné une mal pliée. Le vieux Hantz en apporta une autre. — J’en aimerais mieux une bleu-de-ciel, dit Olivier ; et quand Hantz eut apporté la cravate bleu-de-ciel, Olivier les examina l’une après l’autre d’un air d’incertitude et de perplexité.

— S’il m’était permis de donner mon avis, dit le valet de chambre timidement…

— Vous n’y entendez rien, dit gravement Olivier ; monsieur le comte, je m’en rapporte à vous, qui êtes un homme de goût : laquelle de ces deux couleurs convient le mieux au ton de ma figure ?

— Lady Mowbray, répondit le comte en souriant, ne peut souffrir ni le bleu ni le rose.

— Donnez-moi une cravate noire, dit Olivier à son domestique.

La voiture du comte les attendait à la porte. Olivier y monta avec lui. Ils étaient contraints tous deux, et cependant il n’y parut point. Buondelmonte avait trop d’habitude du monde pour ne pas pa-