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Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 4.djvu/701

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HOMMES D’ÉTAT DE LA FRANCE.

de l’affaire de Drissa, où il se contenta de dire à son compatriote : « Général, vous nous faites marcher de surprise en surprise. » Il y eut quelques brèves et violentes dépêches, quelques hautaines menaces faites assez publiquement pour être regardées comme une disgrâce ; mais l’esprit et la souplesse du général et la magie de son nom italien, comme de son origine, finissaient toujours par le remettre à flot. Je ne veux pas, je ne dois pas m’arrêter à tous les détails de cette histoire militaire, d’ailleurs fort curieux et singuliers ; je ne vous parlerai ici que d’un seul fait de la campagne d’Espagne, d’une affaire qui eut lieu entre Ciudad-Réal et Tolède, et que le général Sébastiani ne désigne jamais autrement que par ces mots : ma victoire d’Almanacid. Peut-être ne serez-vous pas fâché de savoir de quelle nature furent les lauriers cueillis dans la Nouvelle-Castille par le général Sébastiani.

Dans l’été de 1809, le général Sébastiani avait dans la Manche le commandement de quatre régimens d’infanterie de ligne, de quatre régimens de dragons, d’une belle division d’infanterie polonaise, et des hussards hollandais. Ces troupes réunies se nommaient le quatrième corps. Depuis quelque temps, le général Sébastiani soutenait une guerre de plume contre le général Vénégas et la junte de Séville, et cette guerre-là du moins ne l’exposait pas à des surprises nocturnes. Cette correspondance était des plus curieuses. M. Sébastiani répondait, entr’autres choses, au général Vénégas qui invoquait les principes politiques et le droit public : « Élevé dans les camps, je suis peu propre aux discussions politiques, et je me renferme dans la ligne de mes devoirs qui est obéissance aveugle et sans borne au pouvoir, et à mon auguste maître, le plus grand des héros et le plus puissant des monarques. » Cette lettre est du 11 juillet 1809 ; elle fut suivie de quelques autres dans le même goût, et la correspondance cessa par une indisposition du général Sébastiani, qui remit son commandement au général Leval, et alla se rétablir dans les salons de Madrid. Cependant le maréchal Bellune, ayant reçu avis de l’approche de l’ennemi qui s’avançait en force par la vallée du Tage, ordonna au général Sébastiani de se bien porter et de venir, à la tête de son corps, occuper Tolède, en plaçant une brigade en observation à Aranjuez, pour surveiller et garder le pont du Tage. Quelques jours après, le corps