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Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 4.djvu/159

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UNE NOCE À CONSTANTINOPLE.

antique, avec la ligne du front, le plus souvent forme avec cette ligne un angle obtus et s’avance par son extrémité hors du plan de la figure, d’où résulte un air remarquable d’audace et de finesse, accru par la vivacité de l’œil, tempéré par la grâce de la bouche ; et quelle volubilité dans le flux de ses paroles bruissantes, notées d’accens variés ! quelle fréquence de gestes dans son corps vigoureux et svelte ! Ici, l’Arménien, haut de taille, blanc et coloré de face, au front peu élevé, aux yeux grands et noirs à fleur de tête, au nez recourbé et long, ressemblant, par le haut de la figure, au Turc Ottoman, par le bas, plus effilé, au Persan ; comme l’un judicieux, comme l’autre pénétrant ; moins poétique que le Grec, étranger à la grace, homme d’affaires avant tout, et sérieux dans son discours habituellement emprunté à l’idiome turc. Enfin le Juif, avec un front haut et fuyant qui donne à sa coiffure une inclinaison en arrière, des yeux noirs, un nez allongé, des lèvres minces, et la barbe entière ; figure moins large que longue, désarmée de toute passion de guerre, armée de ruse et de défiance ; le Juif, déshérité même de sa langue, et réduit à un espagnol corrompu, souvenir de l’une de ces patries qui l’ont tour à tour adopté et rejeté. Parlerons-nous de l’Albanais, moitié Grec, moitié Slave, et paraissant tenir à cette double origine par ses traits et son langage ; du Kourde aux formes athlétiques, à la face régulièrement dessinée, à l’expression encore sauvage, au verbe chaldéen peut-être ; et du Persan, et des autres populations orientales affluant à Constantinople ? Passez en revue tous ces types tranchés, parce qu’ils s’allient peu entre eux, d’autant plus prononcés que les figures n’ont point modifié le trait commun par ces nuances particulières de physionomie, fruit d’une culture développée, et qu’elles semblent plutôt appartenir à une espèce qu’à des individus ; mais aussi quels types généraux fortement caractérisés, robustes, bien nourris, et combien, comparés à ces faces et à ces corps, semblent rabougris et grêles les Francs du Levant, sorte de repoussoir dans ce tableau ! Regardez cette suite interminable d’arabats, chariots à quatre roues, surmontés de tentures vertes, rouges, jaunes, et traînés par des couples de bœufs blancs, dont le front reluit de plaques d’acier, tandis que, fichées des deux côtés du joug, deux fortes baguettes se recourbent au-dessus d’eux avec des franges