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Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 4.djvu/183

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STATISTIQUE PARLEMENTAIRE.

plement le pouvoir en théorie : elle ne l’a jamais séparé des ministres qui l’exercent, de la main qui le fait agir ; de là son adhésion complète à tous les projets du gouvernement, par un vieil instinct, et le sentiment profondément éprouvé, qu’il faut vouloir les hommes quand on veut la chose. Autour de ce principe se groupent une foule de caractères usés, vieillis dans les affaires, tels que MM. Siméon, Portalis, Barbé-Marbois, administrateurs sous l’empire et la restauration, caractères pusillanimes qui baissent la tête devant tous les évènemens et adorent toutes les fortunes.

De cette nuance aux ministériels purs, il n’y a pas loin ; seulement le ministérialisme à la chambre des pairs a diverses origines : il y a des ministériels de la convention, de l’ancien sénat, de la chambre des pairs de la restauration ; et, par exemple, pour personnifier cet amalgame, M. Rœderer et le duc de Brissac me paraissent la plus curieuse fusion de couleur et de sentiment autour d’un ministre et d’un système.

Depuis quelque temps, il y a eu velléité dans la pairie de former une espèce de tiers-parti, cherchant l’indépendance sans abdiquer les places et les sinécures ministérielles. Vous savez que dans chaque parlement il y a des hommes qui veulent réaliser la double ambition des lucratives positions et de la popularité ; gens à traitemens, habitués de salons, tribuns de coin du feu et de conversations du soir, puis dévoués dans toutes les questions importantes, et ne se séparant jamais du ministère quand il s’agit de mesures vitales, touchant lesquelles il est besoin que chacun se dessine fortement. À la chambre des pairs, ce parti s’est personnifié dans M. Villemain, qui, dans la dernière et courte session, a pris une attitude particulière, une allure d’opposition qui ne va guère à sa physionomie politique.

Chercherez-vous dans la chambre des pairs une opposition constitutionnelle, quelque chose qui réponde au parti Mauguin, Barrot et Laffitte ? Elle y est sans doute, mais si petite, si concentrée, je dirai même avec une si faible dose de capacités, qu’il ne faut pas la compter. Avec cette idée profondément sentie que la chambre est pouvoir de conservation, ces quelques voix aigres et souvent mal éclairées qui se font entendre pour rappeler les principes, ne sont point écoutées avec faveur ; elles prêchent dans un océan de têtes fatiguées ; elles importunent les votes dociles, comme dans le vieux sénat d’Auguste ou de Tibère, la voix de quelque sénateur des temps de la république importunait les âmes assouplies, en rappelant les beaux jours des grandes images. Ces hommes sont peu nombreux. Puis-je compter MM. Boissy d’Anglas fils, Lemercier, et Pontécoulant !