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Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 4.djvu/427

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LOUIS xiii ET RICHELIEU.

jours si fidellement servie et honorée, être en estat de quelque mécontentement. Mais il y a si long-temps que quelques esprits font ouvertement des menées pour troubler les affaires du Roy, qu’il estoit du tout nécessaire d’y remédier. Pendant la guerre d’Italie, ils n’ont rien oublié de ce qu’ils ont pu pour qu’il en arrivast mauvais succès. Depuis, ils ont toujours continué, et en vérité la licence alloit jusqu’à un point qu’on ne l’a jamais veue telle. Monsieur s’en estant allé de la cour en un tel temps, le Roy a supplié par plusieurs fois la Reyne sa mère de vouloir ouvrir les yeux à tous ces maux et concourir avec luy aux moyens nécessaires pour y remédier et en arrester le cours. Mais elle n’a pas eu agréable d’entrer en ses conseils, comme elle avoit accoutumé, ains est demeurée arrestée à ne point vouloir y prendre part, disant qu’elle ne vouloit point que son nom intervinst aux résolutions qu’on vouloit prendre. Le Roy la voyant affermie en cette résolution, a jugé que si elle ne vouloit pas que sa présence luy fust utile à la cour, elle ne pouvoit qu’elle ne luy fust préjudiciable, vu qu’en paroissant mescontente, elle donneroit contre sa volonté hardiesse et liberté à beaucoup de gens de se rendre et dire tels. Je ressens une affliction si grande de ces choses pour la passion que j’ay et auray toute ma vie au service de la Reyne et ce que je luy dois par toutes sortes de respects, que je ne reçois point de consolation, quoique le conseil qu’on a pris en cette occasion ayt été de nécessité, et non d’élection. Je prie Dieu de tout mon cœur que nos maux ne soient pas de longue durée et que je vous puisse tesmoigner de plus en plus que je suis, etc. »

Richelieu avait tout à craindre dans un temps où la haine excusait l’assassinat. Louis xiii, averti par les imprécations de la noblesse du danger que courait son ministre, lui permit d’augmenter le nombre de ses gardes, et le protégea non moins efficacement par un témoignage public de son affection. Il alla, en dépit du cérémonial, le visiter chez lui. Le Cardinal exprima ainsi sa reconnaissance :


AU ROY.

« Il m’est impossible de ne témoigner pas à Votre Majesté l’extrême satisfaction que je reçus hier de l’honneur de sa veue. Ses