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Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 4.djvu/594

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similitudinem mulierum, comme dit le Rituel ; celui de l’Ascension où l’on voyait quelquefois sur le jubé, quelquefois sur la galerie extérieure, au-dessus du portail, un prêtre représenter l’ascension du Christ ; toutes cérémonies vraiment mimiques, qui ont fait, comme nous le verrons, l’admiration des fidèles au moyen-âge, et dont l’orthodoxie a été reconnue par une bulle d’Innocent iii.

En un mot, messieurs, nous verrons au moyen-âge les grands seigneurs et les princes accueillir les jeux scéniques comme un objet de luxe et de parade, le peuple s’y livrer avec un emportement de plaisir effréné ; mais nous verrons le clergé seul s’emparer, dès l’origine, de l’instinct dramatique, le cultiver dans une vue déterminée, le développer avec suite et calcul et l’élever enfin à la hauteur d’un art.

Puis donc que le théâtre européen a reçu, comme celui de l’antiquité, ses premiers développemens du sacerdoce, il est nécessaire de subordonner, dans nos recherches, l’histoire du drame aristocratique et populaire à celle du drame ecclésiastique. En conséquence, nous prendrons pour principales divisions et pour points de repos dans ce cours, les phases diverses de progrès ou de décadence que le drame hiératique a successivement parcourues.

Ces phases sont au nombre de trois : 1o l’époque de la coexistence du polythéisme et du christianisme, époque singulière de dualité pour l’art et la poésie ; 2o l’époque de l’unité catholique et du plus grand pouvoir sacerdotal ; 3o L’époque de la participation des laïcs aux idées et aux arts exercés jusque-là par le clergé seul.

La première de ces périodes s’étend du ier au vie siècle. Nous étudierons deux choses dans cette période : d’une part, la décomposition graduelle du théâtre païen, condamné d’abord presque au mutisme par la politique impériale, qui n’eut de faveurs que pour les pantomimes, puis attaqué par la philosophie stoïcienne, battu en brèche par le christianisme, et enfin détruit par sa propre corruption et par les barbares ; au milieu de cette décadence, nous recueillerons avec soin les derniers monumens du génie scénique ; nous examinerons, entre autres productions de cette époque, le Querolus, cette comédie de Plaute refaite au iie siècle, les fragmens d’une Médée en centons de Virgile, citée par Tertullien, quelques scènes d’une Clytemnestre grecque, ouvrage scholastique