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Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 4.djvu/689

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SONNETS DE SHAKSPEARE.

taire de mon premier chapitre, lorsqu’en 1780 Malone publia, dans son supplément à l’édition de 1778, ses notes et celles de trois de ses amis sur les sonnets en question. Ces trois amis étaient Steevens, Tyrwhitt et le docteur Farmer. Tous s’accordent à croire que plus des deux tiers de ses poésies sont adressés à un homme. Mais quel est cet homme ? Ici leur avis diffère.

Le docteur Farmer prétend que c’est William Harte, neveu de notre poète, et il appuie son opinion sur la mystérieuse dédicace que Thomas Thorpe mit en tête de ces sonnets lorsqu’il les publia en 1609.


To the only begetter
Of these ensuing sonnets
Mr. W. H.
All happiness
And that eternity promised
By our ever-living poet
Wisheth the
Well-wishing adventurer
In setting forth.

T. T.


Son interprétation repose sur deux ou trois erreurs faciles à prouver. Accordons que les initiales W. H. signifient William Harte, il n’y a pas de raison sérieuse de croire le contraire ; mais pourquoi le docteur entend-il par the only begetter la seule personne à qui ces sonnets aient été adressés ? Skinner, Johnson, Chalmers, ont tous réfuté victorieusement cette traduction, et ont prouvé que le sens véritable était : le seul qui ait réussi à procurer ces sonnets au libraire ; et en effet, toute discussion grammaticale sur le mot begetter mise de côté, ne suffit-il pas, pour convaincre le docteur Farmer de méprise, qu’une partie, au moins, de ces sonnets soient incontestablement adressés à une femme ? Mais un fait qui mine entièrement cette hypothèse, c’est qu’on lit dans le registre de la paroisse de Stratford sur Avon, que William, fils aîné de William Harte, qui épousa Jeanne, sœur de Shakspeare, fut baptisé le 28 août 1600 ; et par conséquent il n’était pas même né, que la plus grande partie de ces poésies étaient déjà composées. Je vois