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Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 11.djvu/121

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LES DEUX MUSES.

Et s’avance au hasard, sans jamais rien attendre,
Cédant à ce besoin fatal de se répandre,
Qui l’agite et l’émeut comme un désir divin.


LA MUSIQUE.


Ton visage est auguste et ta voix jeune et douce ;
Harmonieux enfant, je te plains, et je veux
Essuyer de ma main les larmes de tes yeux.
Puisque l’homme cruel désormais te repousse
Lorsque tu parais seule et sans autre ornement
Que ta molle pudeur et ton blanc vêtement ;
Puisqu’il dédaigne, hélas ! ta chevelure blonde,
Tes célestes regards, tes pieds immaculés,
Et tous les purs trésors dans ton sein rassemblés,
Viens t’unir avec moi. Je suis reine du monde,
Et je veux sur ton front répandre comme une onde
La sainte mélodie à jamais en honneur.
Oh ! viens, et tu verras, belle transfigurée,
Demain l’humanité t’ouvrir encor son cœur,
Et l’admiration, sur ta tête sacrée,
Déposer, en chantant une hymne à ta splendeur,
La couronne du monde où l’or de Tyr s’allie
Au saint laurier trempé des flots de Castalie.


LA POÉSIE.


Certes, cet avenir que tu m’offres est beau,
Reine de l’univers, et je t’en remercie.
Mais, dis, que deviendrait ma blonde fantaisie,
Si j’allais la couvrir des plis de ton manteau ?
Ta compagne, dis-tu ?… Non, ta servante indigne.
Adieu, si j’acceptais, ma native beauté !
Il me faudrait ployer sous ta sévère ligne,
Comme dans un tombeau, mes deux ailes de cygne,
Et faire chaque pas selon ta volonté.
Captive sous les fils de ton tissu sonore,
Je verrais désormais le soleil, à l’aurore,