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Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 11.djvu/151

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REVUE ÉTRANGÈRE.

ces deux dispositions, réclamèrent, en faveur de la couronne, la prérogative de nommer directement les sénateurs, sauf certaines conditions d’âge, de services, de fortune ; mais M. Calatrava, qui aurait dû accepter cette tendance des esprits à fortifier le pouvoir et tenter les chances du vote sur cette question, vint déclarer, comme autorisé par la reine, que sa majesté repoussait, au nom de sa fille et de la royauté, la prérogative demandée pour la couronne, et l’article de la commission fut adopté. Si nous sommes bien informés, le premier ministre n’avait pas été autorisé par la reine à faire ce sacrifice, ni surtout à faire intervenir son nom dans une discussion de cette nature ; mais on croit que les principes de la constitution de 1812 ayant déjà subi de si fortes atteintes, il a vu de grands inconvéniens dans une disposition qui aurait en quelque sorte rétabli la chambre des procérès, et qu’il a craint que l’opinion démocratique, déjà si froissée, n’en tirât contre les cortès un parti trop favorable à ses ressentimens et à ses vues.

Après l’adoption de l’article qui consacrait l’intervention de l’électorat dans la constitution de la seconde chambre, la discussion s’est établie sur la durée des fonctions de sénateur. M. Olozaga, qui n’avait point partagé l’avis de la commission sur ce point, a exposé, dans un discours remarquable, pourquoi il jugeait nécessaire de les restreindre à un certain nombre d’années. Ses raisons étaient plausibles. Il ne comprenait pas que le principe électif ayant été appliqué à la composition de la seconde chambre, ce corps ne fût point obligé de se retremper périodiquement à sa source. Il en résulterait alors pour le sénat, disait-il, une prépondérance d’autant plus fâcheuse que les hommes vieillissent vite en Espagne. On rejeta l’article de la commission, pour sanctionner le principe de la durée limitée ; mais ce ne fut qu’à la majorité de huit voix, quatre-vingt-onze contre quatre-vingt-trois, la division la plus nombreuse que nous ayons remarquée dans les procès-verbaux des cortès : tant il est vrai qu’on attribue toujours à un sénat, chambre des pairs ou seconde chambre, une mission de conservation et de résistance à l’esprit novateur et mobile de la démocratie, mission qui, pour s’exercer avec succès, semble avoir besoin de la durée dans le corps qui en est investi, afin que les traditions politiques aient le temps de s’y former et de s’y maintenir !

Dans la plupart des constitutions qui reconnaissent deux chambres électives, on a rendu hommage à cette vérité. Le sénat belge dure huit ans, et se renouvelle par moitié tous les quatre ans, et voici la combinaison assez bizarre et pleine d’inconvéniens, au moyen