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Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 11.djvu/381

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REVUE. — CHRONIQUE.

autour de lui toutes les opinions honorables, que faisaient les meilleures têtes du parti légitimiste ? Quelques hommes, aveugles au milieu de la sécurité universelle, confiaient à des lettres infidèles le secret d’espérances plus folles encore qu’elles ne sont coupables, et de ridicules agitations qui ne s’élèvent pas même jusqu’au complot. Ce sont d’obscures manœuvres, dont un gouvernement fait bien de chercher à couper tous les fils et découvrir toutes les ramifications, parce qu’il est gouvernement pour prévenir moins que pour réprimer. L’un vaut même mieux que l’autre, surtout en fait de conspirations. Mais c’est faire trop d’honneur à de pareilles extravagances et en même temps c’est ne pas être difficile sur les argumens, que de les invoquer contre l’amnistie et le système de conciliation, comme l’a essayé un journal, organe de ressentimens inexplicables et défenseur maladroit de principes qui ne périclitent pas. Malheureusement pour le Journal de Paris, ce n’était pas une conspiration bien terrible, et le cabinet ne s’en effrayait pas trop en accomplissant le devoir que lui imposait une première découverte.

En vérité, le parti légitimiste se fait de bien étranges illusions. Voilà un grand orateur et des hommes d’esprit qui écrivent à Prague, ou ailleurs, qui croient peut-être, dans ce calme profond où nous sommes restés, que la France marche à des convulsions nouvelles, et que ces convulsions tourneront au profit de leur cause ! Et cependant ils voient marcher le monde, ils vivent au milieu de lui ; on ne doit pas les supposer étrangers à la réalité qui les presse de toutes parts et leur donne quelquefois de bien dures leçons. Un livre paraît sous leurs couleurs, écrit par un de leurs partisans, dans l’intérêt de leurs opinions. Ce livre est déféré au jury, qui le condamne, et le jury n’a de rigueurs que pour eux. Dieu nous garde d’appeler des persécutions contre la presse ; ce n’est ni notre rôle, ni notre goût. Mais puisque ce procès a été fait, nous sommes en droit de le montrer aux légitimistes comme un éclatant témoignage du peu de sympathie que la nation éprouve pour leurs affections, leurs regrets, leurs doctrines de gouvernement. Profiteront-ils de cette expérience ? Il est permis d’en douter. Ils continueront à se bercer des mêmes rêves, à protester par mille subterfuges, par mille déguisemens, contre l’œuvre solennelle, et quoi qu’ils en disent, l’œuvre durable de juillet. Ils continueront à prédire tous les trois mois une révolution, comme ils le font depuis sept ans, et à discuter gravement, de Paris à Prague, la légitimité de Louis XIX et de Henri V, toutes choses dont la France ne s’inquiète pas beaucoup, et dont le ministère fera bien de ne pas s’effrayer plus qu’elle.

Au reste, en attendant que ces hautes questions de légitimité soient résolues, on se laisse faire, qui préfet, qui conseiller d’état, maître des requêtes, directeur des affaires d’Afrique, membre du conseil royal de l’instruction publique, comme s’il n’y avait plus de légitimité, voire même plus de doctrine en ce monde. Vainement M. Napoléon Duchâtel a-t-il été supplié de prendre patience, de veiller encore une heure ou deux. M. Napoléon