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Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 11.djvu/709

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AUSONE ET SAINT PAULIN.

blique par sa famille maternelle. Sa destinée participa de cette double origine ; il fut à la fois homme d’étude et de cour, homme de cabinet et d’affaire, professeur et consul.

Le grand-père maternel d’Ausone, nommé Agricius, fit l’horoscope de son petit-fils ; il fut obligé de procéder clandestinement à cette opération divinatoire, à cause des lois sévères, renouvelées à diverses époques, contre ceux qu’on appelait mathématiciens, et qui étaient des astrologues. Peut-être l’Éduen Agricius conservait-il quelques traditions de la vaticination druidique ; un des professeurs dont Ausone a célébré la mémoire, avait pour aïeul un prêtre du dieu gaulois Bélénus. Du reste, l’horoscope était très favorable : il annonçait au jeune enfant des succès et des dignités ; cet horoscope devait se réaliser.

Ausone fut élevé à Toulouse auprès d’un oncle maternel qui s’appelait Arborius, et s’y exerça surtout aux lettres latines ; il confesse qu’il avait peu de penchant pour la littérature grecque. Cependant il a traduit plusieurs épigrammes de l’Anthologie, il a composé des vers grecs, et même des vers moitié latins et moitié grecs, des vers hybrides.

Ausone, après avoir reçu l’éducation la plus soignée, auprès de son oncle Arborius, vint à Bordeaux ouvrir à son tour une école de rhétorique. Il épousa Attusia Lucana Sabina, d’une famille sénatoriale, la perdit bientôt, et ne la remplaça jamais. Lui-même nous apprend qu’il professa trente ans ; c’est probablement pendant cet intervalle qu’il faut placer ses compositions les plus pédantesques et les plus arides, les tours de force, les jeux d’esprit, les épitaphes des héros d’Homère, et d’autres poésies du même genre, délassement laborieux d’un rhéteur.

Au bout de trente ans de professorat, Ausone fut appelé à Trèves par l’empereur Valentinien, qui le chargea de l’éducation de son fils Gratien. — Devenir précepteur d’un prince, c’était une fortune ordinaire aux rhéteurs ; Sénèque, Fronton, Titien et Lactance l’avaient été. Voilà Ausone, de paisible professeur de rhétorique à Bordeaux, devenu un personnage suivant la cour et faisant une campagne contre les Barbares. Ce fut dans cette campagne qu’il reçut, pour sa part de butin, une captive nommée Bissula à laquelle le précepteur de Gratien adressa des vers et des vers assez galans :

« Captive, puis affranchie, elle règne sur le bonheur de celui dont elle était la proie par les armes. »

Ausone demande à un peintre de faire le portrait de la jeune