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Page:Revue des Deux Mondes - 1838 - tome 16.djvu/819

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L’ANGLETERRE DEPUIS LA RÉFORME.

Relativement à l’éducation populaire, un tel état de choses a produit ses inévitables conséquences ; des services admirables sont organisés dans certaines paroisses, pendant que les localités voisines restent dénuées de tout moyen d’instruction. En changeant de ville, on croirait changer de siècle : ici des fondations modèles ; quelques milles plus loin, un abrutissement à peine concevable. Les deux extrêmes de l’intelligence humaine en contact l’un avec l’autre, comme le dénuement face à face avec l’opulence ; la société toujours menacée par l’excès en toute chose, et le monde civilisé écoutant à la fois les belles harangues de Saint-Étienne et les sauvages prédications de Tom Courtenay ; ainsi se présente cette Angleterre où la force sociale maintient une imposante harmonie.

Aussi combien n’est pas profond, combien ne se développe pas, de jour en jour le sentiment intime de ce danger, et de quel côté n’entend-on pas s’élever des vœux pour que le système d’instruction soit radicalement changé, pour que le gouvernement présente à cet égard des vues d’ensemble, et qu’il produise un plan propre à donner enfin des garanties à la société compromise par le manque de toute surveillance publique ! Qu’on lise toutes les enquêtes publiées, depuis la réforme sur l’état de l’instruction populaire en Angleterre, en Écosse et en Irlande ; qu’en étendant ensuite ses investigations, on parcoure les volumineuses evidences données devant les comités des deux chambres sur toutes les questions administratives, depuis le système municipal jusqu’aux lois des pauvres, et partout l’on verra se révéler cette tendance à conférer au pouvoir des attributions nouvelles à raison de faits nouveaux. Il n’est pas un de ces documens qui ne constate la nécessité d’associer au principe volontaire et local le principe coercitif et centraliste, qui ne révèle enfin les progrès rapides de l’opinion hors des voies où elle s’est si long-temps maintenue.

Nous venons de rappeler ces evidences qui précèdent, au parlement d’Angleterre, la discussion de toutes les questions administratives, et c’est ici que se révèle la première conséquence d’une organisation en quelque sorte négative, dont les résultats ne sont atténués que par la vitalité même du génie national. Ne pouvant puiser de renseignemens à aucune source officielle, la législation est contrainte de faire elle même l’instruction complète de toutes les affaires qui surgissent devant elle. Il ne s’élève pas une question, qu’elle se rapporte aux intérêts généraux de l’empire britannique ou à ceux d’une obscure localité, qu’il s’agisse de lois céréales ou d’un rail-way de quelques milles, où le parlement ne remplisse lui-même durant des mois,