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Page:Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 22.djvu/518

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REVUE DES DEUX MONDES.

Sphinx. Les autres ont été l’objet de tâtonnemens qui n’ont pas tous été heureux.

Le personnel appelé à monter cette imposante flotte se compose d’élémens variables et qu’il est difficile d’apprécier. L’inscription maritime et ce que l’on nomme le régime des classes en forment la base. En dehors du recrutement ordinaire, l’état a le droit, dans un besoin urgent, de réclamer pour son service tous les marins valides qui figurent sur les rôles des bâtimens de commerce. Tantôt ces engagemens sont volontaires, tantôt ils sont forcés ; mais la marine militaire n’use de ce dernier moyen qu’avec une grande réserve, et elle y apporte des ménagemens qui éloignent toute idée de comparaison avec la presse des matelots usitée en Angleterre. D’après les calculs de M. le baron Tupinier, l’armement complet de 40 vaisseaux et de 50 frégates exigerait 58,000 hommes, plus 12 à 13,000 hommes pour le service des bâtimens légers. On pourrait demander ces 70,000 marins, jusqu’à la concurrence de 58,000, aux équipages de ligne et aux équipages du commerce, à la grande navigation et au cabotage ; le surplus se trouverait aisément dans les 7,000 }hommes de recrutement qui se renouvellent par septième chaque année. Du reste, cet armement complet ne serait jamais simultané, et 60,000 marins pourraient suffire à toutes les prévisions et à toutes les éventualités de guerre. Pour le moment, nous n’en sommes pas là. Malgré le déploiement imprévu et inaccoutumé qu’ont exigé les affaires d’Orient, 18,000 hommes de l’inscription maritime et 7,000 hommes du recrutement répondent aux besoins du service. Nous craignons même, et nous insisterons plus tard sur ce point, que ce ne soit là notre côté faible, et que les ressources de notre personnel ne soient pas à la hauteur d’un matériel imposant. Le commerce français ne forme guère plus de 27,000 marins, dont il faudrait destiner une part, et la meilleure, à l’armement des corsaires. Quant au reste, il nécessiterait un triage qui le réduirait au moins d’une bonne moitié, et dans ce cas nous ne voyons pas comment on pourrait remonter au chiffre que fixe M. le baron Tupinier pour le déploiement complet de toutes nos forces[1].

  1. D’après les calculs de M. Tupinier, la valeur totale de notre armement naval, dans les conditions de l’ordonnance de 1837, doit s’élever à 339,829,000 francs. Le matériel en magasin était de 298,468,000, en 1837, ce qui constitue une différence en moins de 41,361,000. Divers crédits ont depuis contribué à niveler cette situation. L’allocation portée au budget de 1840 pour les différens services de la marine monte à 72,015,800 fr.