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si ce n’est de la part du trésor, qui n’y perdrait qu’un revenu annuel d’environ 262,000 francs, bien facile à compenser.

Bois exotiques. — Les bois exotiques sont un produit plus imposable que les bois communs ; aussi ne serait-il pas mal qu’ils fussent sujets à des droits d’importation, et qu’on en fît même une source assez abondante de revenu. Il ne faudrait pourtant pas en abuser, car, après tout, ce sont là des matières dont l’industrie française tire un très bon parti, et dont il lui serait facile de faire un emploi bien plus considérable.

Ce chapitre comprend de dix-sept à vingt articles, divisés en trois classes, bois d’ébénisterie, bois de teinture et bois odorans. Il a produit 1,004,890 francs en 1845. Rien de plus facile que de doubler ce produit tout en soulageant les consommateurs. Ce n’est pas que le droit principal établi sur la plupart de ces articles soit élevé ; mais l’assiette en est très irrégulière, très inégale, et surtout les droits différentiels établis en faveur de notre marine marchande sont excessifs. On a voulu multiplier pour notre marine les longs voyages, et Dieu sait comme on a réussi. Dans cette intention, on a grevé d’abord outre mesure les marchandises apportées par ces mêmes navires des pays moins éloignés, et surtout on a frappé avec un redoublement d’ardeur sur le pavillon étranger. La marine française a-t-elle profité de ces faveurs ? Les voyages de long cours se sont-ils multipliés pour elle ? Ce n’est pas ici le lieu de l’examiner. Ce qui est certain, c’est qu’il est résulté de ces mesures un immense dommage et pour le commerce et pour le fisc. Rendons cette vérité sensible par un exemple.

Le droit sur l’acajou apporté de l’Inde par navires français n’est que de 5 francs les 100 kilogrammes : c’est à peu près 14 pour 100 de la valeur officielle, droit modéré et pourtant suffisant ; mais lorsque ce bois est apporté d’autres pays hors d’Europe, toujours par navires français, il paie 7 fr. 50 cent. les 100 kilogrammes ; s’il est apporté des entrepôts, 18 fr. 50 cent. ; enfin, s’il nous arrive par navires étrangers, le droit s’élève à 21 fr. 50 cent., ou plus de quatre fois le droit primitif.

Encore ne s’agit-il là que des billes d’acajou qui ont plus de 3 décimètres d’épaisseur : c’est bien pis pour celles d’une dimension moindre. Quand elles sont importées de l’Inde par navires français, le droit n’est toujours que de 5 fr. les 100 kilogrammes ; seulement il faut qu’elles viennent des lieux mêmes de production, sinon le droit s’élève à 15 fr. Que ces mêmes navires les apportent d’autres pays hors d’Europe, elles paieront, venant des lieux de production, 7 fr. 50 cent., et d’autres lieux, 22 fr. 50 cent. ; si elles sont importées des entrepôts, toujours par navires français, le droit sera de 55 fr. 50 cent., ou plus de onze fois le droit primitif. Que si, par malheur, elles ont été transportées par navires étrangers, elles paieront, selon les lieux d’où elles viennent, 21 fr. 50 cent., ou 64 fr. 50 cent. les 100 kilogrammes, ce qui fait, dans