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au parlement de Metz, avait donné aux habitans des Trois-Évêchés l’autorisation de partager les communaux, à la condition que le partage aurait lieu entre les chefs de famille après une délibération régulière tenue dans chaque paroisse. Seulement, aux termes de l’édit, les lots étaient indivisibles, inaliénables : ils étaient héréditaires en ligne directe ; dans le cas de succession collatérale, ils revenaient à la commune, qui, on le voit, n’entendait pas abdiquer tous ses droits et faire une aliénation complète. M. Dareste remarque avec raison que ce système, appliqué plus d’une fois, était au fond le même que celui des très anciens partages. Grâce aux progrès du droit public en France, le partage est tombé dans l’opinion ; il a été repoussé par la plupart des conseils-généraux. S’il a été admis par ceux des Landes, de la Creuse et de la Corse, cela tient sans doute aux conditions particulières dans lesquelles se trouvent ces départemens, où la population est souvent divisée en petits groupes, surtout dans les Landes et la Creuse, au milieu d’immenses solitudes dont l’aridité est proverbiale. Ainsi que l’a fort bien dit le conseil-général du Gard, il ne serait pas plus rationnel de partager les biens communaux entre les habitans d’une commune qu’il ne le serait de partager le domaine de l’état entre les habitans de la France. La jouissance actuelle ne doit-elle pas devenir celle de la génération future ? Avant de déclarer ouverte la succession des communes, il faudrait qu’elles eussent cessé d’exister. Le conseil-général de la Meurthe a rapporté l’exemple de réunions d’habitans qui, après le partage de la convention, avaient spontanément rendu leurs lots à la commune. La mesure prise par la convention est restée odieuse comme un attentat à la propriété, et l’on peut ajouter que c’en était un véritable, car ceux-là mêmes qui la firent prévaloir disaient hautement que dans leur manière de voir la convention pouvait tout aussi bien disposer des propriétés particulières, si elles étaient nécessaires à la république. Ainsi pensait le député Lozeau.

Le système de la vente des biens et du remplacement en rentes sur l’état a réuni plus de suffrages au sein des conseils de département. Il a, il faut le dire, un côté séduisant, et qui le fait plus facilement admettre tout d’abord : c’est l’avantage apparent qu’il peut procurer aux communes. Il se pose en chiffres : combien rapportent les pâturages ? quel profit peut-on tirer des landes et des bruyères ? Eh bien ! que l’on convertisse ces propriétés en rentes sur l’état : au lieu de terres incultes et peu productives, on aura un capital, et la caisse municipale recevra régulièrement un intérêt de 4 1/2 pour 100. En même temps la commune sera déchargée de la gestion de ces biens qui lui rapportent si peu de chose. Ainsi plus de profit, moins de peine, sécurité complète : le bénéfice est net et palpable,