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Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 19.djvu/978

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la ligue aient eu jusqu’ici un grand résultat, et il ne serait peut-être pas utile de mentionner cette tentative avortée, si elle n’avait donné naissance à un exposé des motifs du projet publié à Bruxelles en 1857 qu’il peut être intéressant de consulter.

Les principes économiques professés dans le volumineux travail dont il s’agit ne semblent point inacceptables ou erronés. Toutefois, dans son désir d’assurer à ses compatriotes les ressources d’un crédit à meilleur marché que celui des banques dites d’actionnaires, l’auteur a fait preuve d’un zèle poussé jusqu’à l’injustice. A coup sûr, mieux vaut à crédit égal l’assurance mutuelle proprement dite que l’assurance des compagnies à primes, car dans ce cas l’assurance mutuelle est moins chère; mais, même au point de vue du bon marché, tout dépend du crédit. Or, si la confiance du public était plus grande d’un côté que de l’autre en raison de l’habileté présumée d’une gestion dont l’intelligence a l’intérêt personnel pour stimulant, des banques mutuelles ne seraient point préférables aux banques d’actionnaires, et on rendrait un mauvais service au public lui-même en cherchant à ébranler le propre crédit de ces derniers établissemens. Constituer des banques d’actionnaires n’est point commettre une hérésie aux yeux de la science, ni une mauvaise action aux yeux du public, et à ce compte la polémique de l’auteur de l’exposé des motifs de la ligue du crédit a dépassé le but qu’il voulait atteindre. Seulement il lui était permis, et il avait pour défendre son opinion l’argument irrésistible d’un fait, il lui était permis, dis-je, de préconiser une nouvelle forme d’institution, et de mettre en lumière les avantages de la mutualité en matière de crédit, comme ils sont évidens en matière d’assurance. La partie la plus intéressante à coup sûr de ce travail est celle qui traite de la statistique de la Belgique : elle doit cependant inspirer des réflexions contraires à celles de l’auteur.

La nation belge se compose de 908,845 familles formant une population de 4,426,212 âmes. Le cens de l’élection est de 42 fr. 32 cent., et le nombre des électeurs de 78,234. En dehors de ce chiffre, qui représente les classes les plus aisées de la nation, on compte 385,000 familles de petite bourgeoisie, et 446,000 familles d’ouvriers, parmi lesquelles 205,000 appartiennent à la classe indigente. De 1850 à 1853, la population s’est accrue de 122,215 individus; la proportion pour la classe ouvrière a été dans cette augmentation de 49 individus sur 100, pour la classe des petits bourgeois de 42, et pour les classes aisées de 9. A côté de ces chiffres, qui nous paraissent moins alarmans qu’à l’auteur de l’exposé des motifs, on met en regard la division toujours croissante de la propriété, qui est annuellement de plus de 30,000 parcelles, et l’augmentation de la dette hypothécaire, constatée par l’élévation de l’impôt