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Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 26.djvu/125

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trine allait subir de nombreuses altérations, et sa vie, si simple en elle-même, devenir un tissu de fables merveilleuses et de récits fantastiques.

À ses noms de Siddhârtha, Gôtama, Çâkyamouni et Bouddha, plusieurs autres s’ajoutèrent pour traduire ses qualités ou exprimer le respect populaire : on l’appelait Tathâgata, ce qui veut dire celui qui a bien suivi ses prédécesseurs. Ce titre, que Çâkyamouni paraît s’être donné à lui-même, est d’une grande importance en ce qu’il indique que le législateur ne se regardait que comme le continuateur de Bouddhas antérieurs, de sages qui l’avaient précédé. De même il admit qu’après lui des séries de sages s’élèveraient pareillement du rang de Bodhisattva, ce qui littéralement veut dire « qui a l’essence de la bodhi (sagesse), » à celui de Bouddha parfait, pour aller, à travers les divers mondes, racheter les créatures, puis entrer en possession du joyau de l’omniscience, le fortuné nirvâna.

Çâkyamouni fut encore appelé Sougata, le bienvenu, Baghavat, le bienheureux, et Arhat, le vénérable. Enfin en Chine il s’appelle  ; mais ce nom ne représente ni un titre ni une qualité, comme les précédens, il est seulement le résultat d’une transcription chinoise incomplète du nom de Bouddha. On racontait que la prédestination du sage fut nettement indiquée à sa naissance par la manifestation des trente-deux signes caractéristiques et des quatre-vingts marques secondaires auxquels un Bouddha peut être reconnu. De ces signes merveilleux, voici les plus remarquables : une protubérance du crâne sur le sommet de la tête, les cheveux bouclés, inclinant vers la droite, d’un noir foncé à reflets changeans ; un front large et uni ; une touffe de poils entre les sourcils, blanche comme la neige ou l’argent, l’œil d’un noir foncé ; des dents au nombre de quarante. Le trente et unième signe consiste en une figure de roue imprimée sous la plante du pied ; de là ces nombreuses empreintes du pied du Bouddha que l’on montre dans plusieurs régions, et jusque dans l’empire de Siam et à Ceylan, où il n’est jamais allé.

Dans la légende, la naissance du Bouddha revêt un caractère merveilleux ; le Lalitavistâra le représente au milieu des jardins célestes de Çrâvasti, entouré de ses cinq disciples, de douze mille mendians et de trente-deux mille Bodhisattvas, tous dans l’heureuse perspective d’une seule et dernière renaissance ; il se plonge dans la méditation. Alors une excroissance lui pousse sur le sommet du crâne, et lui rappelle tous les Bouddhas antérieurs ; la lumière de la science sans passion se produit en lui, et plein de pitié pour les Bodhisattvas, les dieux, les hommes, les asouras (esprits des airs) et le monde, il prend la parole et consent à raconter comment il doit s’incarner parmi les hommes. Ses divers auditeurs sont dans