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Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 28.djvu/570

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Dans cet atelier, où il ne s’agit que d’étendre le coton avec la main et de le présenter aux machines, on emploie presque exclusivement des femmes. Si le bâtiment a été construit spécialement pour cette destination, et que l’espace soit suffisant, on remédie en grande partie aux inconvéniens du battage et de l’épluchage par une forte ventilation qui appelle au dehors la poussière et les détritus du coton ; mais il est beaucoup de centres industriels où les manufactures se sont établies dans des édifices dont la destination primitive était tout autre. Quelquefois aussi elles ont pris des accroissemens successifs qui ont obligé le fabricant à entasser les machines et les travailleurs. Le sol est humide, les parois de l’atelier noires et encrassées, les fenêtres étroites et peu nombreuses. Les simples visiteurs ne peuvent respirer dans ces tristes salles, et les éplucheuses, qui doivent y passer douze heures par jour, résistent avec peine à cette atmosphère chargée de poussière et de débris végétaux.

L’atelier des préparations est aussi un atelier de femmes. Les soigneuses de carderie et en général les femmes de préparation sont dans de bien meilleures conditions que les éplucheuses. Elles n’ont d’autre occupation que de présenter à la carde le coton monté sur des cylindres, de surveiller la marche de la machine, de rattacher les nattes qui se sont rompues ; ce travail demande plus de soin et d’attention qu’il n’impose de fatigue. Dans les grands établissemens construits et dirigés avec intelligence, l’air et l’espace ne manquent pas, l’atelier est propre, et l’ouvrière ne subit d’autre inconvénient que celui d’une température élevée sans être énervante (18 ou 20 degrés de température sèche). Les cardes, en assez peu de temps, se remplissent de bourre, les dents s’émoussent : il faut les débourrer et les aiguiser ; mais le débourrage, opération très malsaine, est fait presque partout par des hommes, et l’aiguisage a cessé d’être dangereux depuis qu’il se fait à la mécanique. Le métier de soigneuse de carderie serait donc en somme un métier très doux, s’il était partout exercé dans des conditions normales ; mais il faut ici encore signaler un grand nombre d’établissemens où rien n’a été fait pour l’hygiène du travailleur. Le nombre des machines est si grand qu’on peut à peine circuler ; les femmes suspendent le long des murailles les vêtemens que la chaleur les oblige de quitter, ce qui obstrue encore le passage, offense la vue et aggrave l’insalubrité du local. Malgré les recommandations pressantes de l’autorité, les engrenages qui donnent le mouvement à la machine ne sont pas toujours enveloppés de boîtes ; les vêtemens, les membres, peuvent être saisis, et pour éviter des accidens terribles, les ouvrières sont obligées à une attention perpétuelle sur elles-mêmes.

Le troisième atelier de la fabrique, celui qui renferme les mé