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Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 28.djvu/997

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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 août 1860.

On doit commencer à comprendre, non-seulement en France, mais en Italie, les raisons trop réelles de la sérieuse tristesse que nous inspire depuis quelque temps la marche des affaires de la péninsule. Les questions italiennes sont revenues pour le moment au premier plan parmi les périlleux problèmes qui tourmentent l’Europe. — Naturellement c’est l’intérêt français engagé dans la question italienne qui nous préoccupe avant tout ; mais les intérêts italiens bien entendus nous paraissent se confondre si étroitement dans la circonstance présente avec les intérêts français, que nous ne nous faisons aucun scrupule de nous placer au point de vue même de l’Italie pour appeler l’attention réfléchie des hommes qui ont la responsabilité des destinées italiennes sur l’état vrai des choses et sur les perspectives prochaines vers lesquelles ils ont l’air de marcher les yeux fermés. Certes nous avons le droit de nous inquiéter comme Français de ces perspectives. Les Italiens vont gratuitement, sans nécessité, et l’on peut dire sans préparation, au-devant d’un conflit avec l’Autriche. Engagés dans une lutte aventureuse et prématurée avec une puissance militaire que la France elle-même a trouvée redoutable, s’ils venaient à succomber, comme on est trop fondé à le craindre, ils placeraient la politique française dans la plus triste alternative : ou la France irait à leur secours, ou elle laisserait s’accomplir le triomphe de l’Autriche. Dans le premier cas, la France serait entraînée dans une guerre allumée par une politique qu’elle aurait frappée du blâme le plus formel, provoquée par des idées et des hommes qu’elle aurait hautement désavoués d’avance ; elle assumerait les risques de la lutte contre une coalition européenne, en se mettant à la remorque d’une politique qui aurait rejeté et dédaigné ses conseils ! Dans le second cas, nous ne savons si le danger serait moindre, mais l’humiliation serait plus lamentable : deux ans après avoir gagné la bataille de Solferino, un an après