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Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 32.djvu/570

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analogue à celle de Sacramento sur le fleuve de ce nom. La plaine qu’arrose le San-Joaquin est admirablement cultivée, et Stockton, ville d’entrepôt pour toutes les mines du sud, comme Sacramento et Marysville pour celles du nord, fait un commerce très important. C’est là qu’on embarque une grande partie du blé de la Californie. La population de Stockton est aujourd’hui d’environ 12,000 âmes. Ces villes, et beaucoup d’autres d’un ordre inférieur, sont toutes dotées de larges rues éclairées au gaz, bien alignées, souvent pavées ou macadamisées, et toujours munies de vastes trottoirs en dalles, en briques ou en planches. On y trouve plusieurs théâtres, des salles de concert, des lieux de réunion, des cafés. Dans d’immenses et magnifiques magasins, rappelant ceux de Londres, de New-York ; et de Paris, sont étalés les plus belles étoffes, les meubles les plus élégans, les bijoux les plus précieux. La monotonie du tracé géométrique des rues est rompue par des squares où des arbres répandent leur ombre sur un gazon semé de fleurs. Partout de vastes hôtels sont ouverts au voyageur : il y rencontre tout le comfort désirable, pourvu qu’il ait soin, s’il est étranger, d’abandonner ses habitudes nationales et de se plier aux mœurs du pays.

La plupart des maisons californiennes sont encore construites en bois, mais on remarque à San-Francisco de beaux édifices en pierre, particulièrement l’hôtel de ville, la douane, la poste et l’hôpital de la marine, qui datent de la naissance même de cette curieuse cité. C’est aussi dès les premiers jours de San-Francisco que fut élevé, dans la rue Montgomery, ce magnifique bâtiment, tout de granit, où sont maintenant installés les bureaux de la plus puissante maison de banque de la Californie. Ce granit fut envoyé de Chine, débité et taillé à l’avance, car la main-d’œuvre était alors trop chère dans les villes de l’Eldorado pour qu’on pût songer un instant à extraire et à tailler avec avantage les granits du pays. C’est encore de cette époque que date le fameux bloc de Montgomery, assurément l’une des plus vastes maisons qui existent dans les villes modernes, et l’une des mieux ordonnées pour l’architecture extérieure. La Californie se prête malheureusement très peu aux constructions en pierre. Les grès et les calcaires manquent presque partout, principalement dans le voisinage des villes, et la brique, que l’on emploie de préférence, est encore fort coûteuse et d’assez, médiocre qualité. On a commencé aussi à bâtir en fer, et l’on a élevé de la sorte une cinquantaine de maisons à San-Francisco. Les constructions mexicaines en adobe (lattes et terre) n’ont jamais convenu aux Américains, et les cinq ou six bicoques ainsi construites qui restent à San-Francisco perdues dans un coin de la ville datent du bon temps où la reine du Pacifique s’appelait du nom modeste d’Yerba-Buena. Quant aux constructions en granit, les frais de transport et de mise en œuvre en rendent toujours le prix très élevé. Ces matériaux n’ont été jusqu’ici employés que dans des cas spéciaux, pour des fortifications par exemple, des bordages de trottoirs, des pavages de rues, ou bien pour des édifices somptueux, mais non pour la