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la nouvelle organisation offre son bon côté : avec le projet que nous présentons, les mobilisations n’auront plus pour conséquence de jeter le trouble dans les familles, dans l’industrie, le commerce, l’agriculture. L’armée permanente pouvant suffire aux premières difficultés d’une guerre, il ne sera pas nécessaire d’appeler les milices à chaque mobilisation ; par conséquent les communes seront affranchies des charges pour l’entretien des familles des miliciens ; la landwehr à cheval étant supprimée, les arrondissemens et les villes n’auront plus de dépense à faire pour les chevaux de ce corps. Enfin la nouvelle organisation fait peser la charge du service sur les jeunes gens, et elle en affranchit les hommes mûrs, plus utiles au travail productif du pays. »

Les libéraux ne se trouvèrent pas satisfaits. — Il était imposable, disaient-ils, de faire accepter par la Prusse les charges immenses qu’on lui demandait. En établissant l’obligation générale du service militaire, on obtenait déjà une augmentation d’un tiers sur l’effectif. Réduisez donc la durée au service dans la ligne de trois ans à deux ; faites des économies sur les chapitres des pensions, des voyages et des nombreuses sinécures militaires ; faites cesser le régime des viremens de fonds, que pratique seul en Prusse le ministre de la guerre, et vous arriverez à peu près au but dont nous reconnaissons nous-mêmes l’utilité. — En présence de cette attitude de la majorité, le ministère retira son projet et se borna à demander la prolongation du crédit de guerre voté en 1859 jusqu’au 1er juillet 1861. La chambre accéda à cette demande, qui réserva la question de principe. Le parti libéral avait espéré que le ministère modifierait son premier projet et apporterait un nouveau plan à la session suivante. Cette espérance fut déçue. Bien plus, dans l’intervalle d’une session à l’autre, le gouvernement, ou plutôt le ministre de la guerre, M. de Roon, alla dans l’exécution de son premier plan de réforme aussi loin qu’il le pouvait sans porter directement atteinte à la loi de 1814, qui règle l’obligation des citoyens au service militaire. Pourtant les mesures prises par le ministre de la guerre impliquèrent dans leurs conséquences la modification de la loi de 1814 : un conflit avec la chambre parut imminent, l’opinion s’émut, et la question se dressa menaçante entre le pays et la chambre d’une part, le gouvernement de l’autre. Les députés libéraux évitèrent encore une fois une rupture. À la séance du 31 mai 1861, ils votèrent une résolution ainsi conçue : « Le gouvernement royal, dans le cas où il voudrait maintenir les mesures prises pour la réorganisation de l’armée, sera tenu de soumettre à la diète, à la session prochaine au plus tard, un projet de loi portant modification de la loi militaire de 1814. » Le ministère répondit à ce vote en annonçant la-présentation dû projet pour la