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Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 37.djvu/703

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d’autre en soixante-dix ans. Le dernier exercice publié avec détails, celui de 1859, donne les résultats suivans[1] :


Importations anglaises (valeur déclarée) (179,334,981 l. st.). 4,483,374,525 fr.
Importations françaises (comm. gén. — Val. act.) 2,354,800,000

La valeur des marchandises envoyées de toutes parts sur les marchés britanniques dépasse donc aujourd’hui les importations françaises de 2 milliards 128 millions, soit plus de 90 pour 100.


Exportations anglaises (valeur déclarée) (130,440,4271. st.) 3,261,010,075 fr.
Importations françaises (comm. spéc. — Val. act.) 2,260,400,000

Les ventes faites par l’industrie britannique dépassent le chiffre des exportations françaises de 994 millions, soit près de 44 pour 100. Si maintenant on entrait dans le détail des chiffres, on verrait que la supériorité britannique tient au développement de certaines industries qui, sous l’ancien régime, étaient à peu près de niveau dans les deux pays, mais auxquelles a manqué chez nous l’aiguillon de la concurrence. Ainsi l’Angleterre savait au siècle dernier, comme aujourd’hui, que son sol est riche en fer et en charbon, et la possibilité de réduire les minerais au moyen du coke était démontrée depuis longtemps. La routine résistait, la législation créait des obstacles : les métallurgistes transportaient leurs capitaux et leur industrie en Suède et en Russie. Tout à coup l’émulation se développe, et, au lieu de 30,000 tonnes de fer exportées en 1788, l’Angleterre envoie aujourd’hui à l’extérieur, après avoir pourvu chez elle à des besoins immenses, 1,534,705 tonnes au prix de 287 millions. L’exportation française est certainement tombée fort au-dessous de ce qu’elle était à la fin du siècle dernier.

Il y avait soixante ans que John Wyatt avait filé à la mécanique le premier écheveau de coton : la grande industrie n’avait pas encore daigné s’intéresser aux essais de quelques artisans pauvres et obscurs. Le charpentier Hargreaves et le tisserand Crompton mouraient de faim. Dans quelques villages où avait germé, on ne sait comment, l’ambitieuse pensée de créer des métiers, c’étaient les capitalistes de l’endroit, le charron, le menuisier, le tanneur, le

  1. Dans la confection des tableaux des douanes que je compare, il y a des différences dont il est bon de tenir compte. Les documens français distinguent, comme chacun sait, le commerce général et le commerce spécial, et pour chacune de ces catégories des valeurs officielles remontant à 1820 et des valeurs actuelles représentant les cours du jour. En Angleterre, on ne mentionne à l’importation que ce qui correspond à notre commerce général, et les valeurs sont actuelles et vérifiées. Quant, aux exportations, on n’additionne que le produit du sol et des ateliers métropolitains, ou valeurs positives. Les produits des colonies britanniques sont classés comme articles de transit et non évalués. Pour diminuer les causes d’erreur, il faut comparer à l’importation le commerce général, et à l’exportation le commerce spécial, le tout estimé aux prix du jour.