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Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 47.djvu/223

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très sombre. Ce couloir, percé de quatre portes latérales, glissait entre quatre petites chambres, et tournait ensuite à gauche pour aboutir à une seconde issue débouchant sur l’autre ruelle. A l’étage supérieur, il reste quelques pans de mur, des traces du balcon et quelques fragmens de peintures. On y a trouvé une sonnette de bronze. Paul Diacre nous apprend que les anciens includebant in angusto prostibula et admittentes tintinnabula percutieband, ut illo sono illarum injuria fieret manifesta. Entre autres curiosités, bien que la maison eût été déjà précédemment fouillée, on a trouvé un caccabus de cuivre plein d’oignons et de haricots, humble pitance qu’on avait mise de côté le 23 novembre 79 pour servir de souper, vers la dixième heure, à ces pauvres filles. Les haricots étaient déjà, sous les Romains, une maigre chère. Virgile les appelle dédaigneusement vilem fasellum.

De ce triste réduit, fort mal hanté, il ne reste plus que le couloir, les quatre cellules, dont les entrées sont surmontées de peintures grossières et obscènes, mais bien conservées, et un immense répertoire d’inscriptions à la pointe qui nous révèle les secrets de l’endroit. Je ne peux les transcrire ici, je n’ai pas les franchises de la science. M. Fiorelli, qui les a étudiées patiemment avec un intérêt de paléographe, les a données dans le deuxième volume de son Giornale degli Scari. C’est à peine si j’ose transcrire ici les moins indécentes, celles du moins qui s’expriment à mots couverts, celle-ci par exemple dénonçant une des irrégulières fraternités dont parle Pétrone : Has cum Magno ubique, et cette autre que je complète pour l’intelligence du lecteur : c’est un salut aux filles de Pouzzoles. de Nocera, de Pompéi et d’Ischia : Putcolanis feliciter omnibus Nucherinis! Felicia et universis Pompeianis Pitecusanis! — Cette autre encore, hommage rendu probablement par des gladiateurs : Victrix victorum. Et cette dernière enfin, que je suis forcé d’écourter : Victor cum Altine hic fuit, Africanus moritur... Condisces. Cui dolet pro Africano? « Je vous en prie, qui portera le deuil d’Africanus? » Ce dernier mot, inscrit en cet endroit, est d’une étrange philosophie.

Une maison voisine, sans grande apparence, servait de dépôt, de magasin peut-être, à une collection de beaux vases en bronze, plaqués d’argent et ciselés avec une précieuse élégance. Parmi ces curiosités régnait la merveille qui trône maintenant au musée de Naples : une statuette déjà célèbre, bien qu’elle n’ait été retrouvée que l’an dernier et qu’elle ne mesure pas même 60 centimètres. Elle figure un jeune homme nu, d’une beauté svelte, élancée, délicate et fine avec un air d’indolence et de mélancolie. Ses cheveux, bouclés avec soin, sont retenus par un rameau courbé; le myrte y