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Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 47.djvu/719

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tout y a été livré soit aux corporations religieuses, soit aux autorités municipales, qu’aucune grande école n’a jamais fonctionné en Italie pour former les professeurs des gymnases et des lycées, que chaque province, on pourrait presque dire chaque ville, voulait avoir, tant bien que mal, son université. La conduite que nous devons tenir n’est-elle pas tracée par les événemens? Ne devons-nous pas, en même temps que nous fonderons notre enseignement suivant les exigences de l’esprit moderne, le mettre en harmonie avec notre unité nationale? Ne faut-il pas empêcher que le peu de forces vives que nous possédons ne se dissipe faute d’être concentré? Ne faut-il pas, dans l’intérêt de la nation et de la science, refondre plusieurs de ces institutions, qui ne représentent plus que d’anciennes divisions politiques ou des vanités municipales? L’état seul peut obtenir ces résultats en Italie. C’est à lui, soutenu par l’opinion publique, qu’il appartient à la fois de relever le niveau des hautes études et d’encourager l’instruction populaire, maintenant si négligée. Je n’espère point qu’en vingt ans l’Italie puisse renouveler cet exemple fameux donné par l’armée prussienne, où sur deux cent mille soldats il n’y avait, dit-on, que six hommes qui ne sussent ni lire ni écrire. Malheureusement elle renferme des provinces où les termes de cette proportion sont à peu près renversés, et c’est là un état de choses qui appelle un remède énergique. Est-ce à dire que nous demandons des lois coercitives contre les familles qui n’envoient pas leurs enfans à l’école, ou une armée d’inspecteurs pour obliger les enfans d’y aller? De tels procédés ont pu venir à l’esprit des princes absolus, quand il entrait dans leur politique d’éclairer leurs sujets, quand ils luttaient par exemple contre l’église; mais, dans un pays qui est libre ou qui veut le devenir, une loi qui donnerait un caractère obligatoire à l’instruction élémentaire, et qui s’appuierait sur des sanctions pénales, ne pourrait qu’échouer, ou devenir tyrannique. Nous ne voulons qu’une ingérence plus modeste de la part de l’état, quelques agens ministériels bien choisis, voyant de près les écoles élémentaires et secondaires, et capables de leur donner une impulsion efficace et une direction éclairée. Nous demandons qu’on accorde des subsides plus larges aux communes, surtout dans les provinces méridionales, pour les aider à fonder des asiles, des écoles du soir pour les adultes, des bibliothèques populaires; nous demandons des prix et des encouragemens pour les instituteurs qui tiennent le mieux leurs écoles et qui attirent dans leurs classes le plus grand nombre d’élèves.

L’objection dirigée contre le système coercitif n’est pas la seule d’ailleurs qu’ait à combattre celui qui entreprend de réformer les institutions scolaires; il a aussi à lutter contre ces préjugés qui, au nom de la liberté, s’opposent à ce qu’on introduise dans le plan des