Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 47.djvu/789

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

hommes et femmes, des folles furieuses, des imbéciles, des épileptiques, des aveugles, des incurables, etc. A Bicêtre, même spectacle, plus repoussant encore. Sexes, âges, infirmités, tout y était confondu. Avant l’année 1801, on y comptait 1,505 lits où les malades couchaient seuls, 262 où ils couchaient deux, 144 lits à double cloison et un certain nombre à quatre. Quelquefois le même lit servait à huit personnes, dont la moitié veillait une partie de la nuit pendant que l’autre moitié essayait de dormir. Côte à côte avec l’hospice de, Bicêtre se trouvait la prison de même nom. M. Pariset, dans un rapport au conseil-général des prisons fait en 1819, pour peindre d’un mot l’état de Bicêtre au moment dont nous parlons, disait: « J’ai vu Bicêtre à deux époques différentes : dans la première, Bicêtre réalisait l’enfer des poètes; aujourd’hui, en 1819, il s’administre comme un couvent. » Lorsque le comte Frochot fut appelé à la préfecture de la Seine, l’enfer de Bicêtre prison ne devait pas présenter un spectacle plus horrible que celui de Bicêtre hôpital et maison d’aliénés.

Or c’est presque à son entrée en fonction, c’est-à-dire en février 1801, que le premier préfet de la Seine installa l’administration générale des hospices au parvis Notre-Dame, en face de l’Hôtel-Dieu. Il trouva dans une simple combinaison d’attributions officielles le moyen de porter un prompt remède au mal et de préparer pour l’avenir les plus sérieuses améliorations. Il nomma un conseil-général et une commission administrative chargés du service de tous les hospices et hôpitaux civils, ainsi que des institutions qui s’y rapportent, archives générales, bureau central d’admission aux hôpitaux, écoles de charité, et crèches. Les résultats obtenus par une réunion d’hommes animés d’un même esprit, moralement responsables du succès de l’œuvre concentrée dans leurs mains, ardens à proposer et à réaliser eux-mêmes toutes les améliorations, justifièrent promptement la mesure prise dès 1801. En 1806, le nombre des malades admis dans les hôpitaux s’élevait à 28,000; et dépassait 37,000 six ans plus tard, vingt-quatre établissemens venaient se placer sous l’administration générale des hospices, et dans chaque arrondissement se créaient des maisons de secours avec l’annexe indispensable des écoles de charité. La distribution des secours à domicile se faisait avec ordre et régularité. Bientôt on établit une filature en faveur des indigens, le bureau de la direction des nourrices, la pharmacie centrale et la boulangerie générale. Des réparations extérieures répondaient à ce renouvellement du régime intérieur des hôpitaux. Dès 1801, on ajouta des bâtimens nouveaux à l’hôpital Saint-Antoine, on créa l’école de la clinique interne, on améliora les abords de l’Hôtel-Dieu, on établit dans des maisons différentes l’hospice de l’allaitement et celui de l’accouchement.