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ger la face de la situation intérieure, et remettre la France sur le grand chemin de la liberté. On s’apercevra bien de cette vérité quand on arrivera au débat des questions d’affaires. C’est aux finances que viennent aboutir toutes les branches de la politique pratique. Les lois de finances sont par excellence l’apanage du pouvoir législatif. C’est en finances qu’une assemblée représentative doit surtout avoir la pensée sûre et la main ferme. C’est pour la bonne gestion des finances qu’un gouvernement prudent et appliqué doit rechercher dans un corps législatif les lumières et l’indépendance ; il est le premier intéressé à trouver au besoin dans la résistance de la chambre élective un contrôle qui l’arrête dans ses entraînemens et le ramène à la conception unitaire et harmonique des intérêts multiples et complexes qui forment les diverses branches de la politique nationale. Une chambre élective ayant la conscience de sa spontanéité rappellera à temps au gouvernement que l’équilibre financier ya être compromis tantôt par une expédition lointaine dont les conséquences ne peuvent être mesurées, et où les dépenses ne seront nullement proportionnées à l’intérêt politique engagé, tantôt par une impulsion trop accélérée donnée aux travaux publics, qui accumule soit sur le capital disponible du pays, soit sur le trésor, des charges trop lourdes à un moment donné, qu’il serait préférable de répartir sur un plus long espace de temps. Une telle chambre rappellera encore ou que la dette flottante est trop lourde, ou que l’impôt est excessif, et peut décourager et amoindrir le mouvement de l’épargne nationale. En indiquant ici le rôle qu’aurait à remplir une chambre élective, à la condition qu’elle ne serait point une émanation indirecte du pouvoir exécutif, nous ne croyons point nous écarter des intentions que le gouvernement lui-même a manifestées dans une circonstance solennelle. L’empereur a évidemment cherché un secours dans l’assemblée représentative quand, après la publication du célèbre mémoire de M. Fould, il renonça au système des crédits extraordinaires ouverts par décrets ; mais, pour que cette intention puisse être efficace, il est aujourd’hui visible, après une expérience de deux ans, qu’il serait nécessaire que la pratique électorale du gouvernement fût mise d’accord avec ses bonnes résolutions financières ; il serait nécessaire qu’une plus grande spontanéité fût laissée au suffrage universel.

Les embarras, les inquiétudes, que cause éternellement en France la question financière sont pour nous un étonnement toujours nouveau. Il n’y a pas au monde de pays doté d’une prospérité intrinsèque égale à celle de la France. Nous doutons que l’Angleterre, malgré les accumulations de capitaux dont elle dispose, surpasse la France en véritable richesse. L’épargne agit dans notre pays avec une puissance qui a surpris même ceux qui avaient la meilleure idée de ses ressources. Et pourtant un véritable malaise vient périodiquement entraver l’essor de confiance auquel il serait si naturel que les capitaux français se dussent livrer. Les inquiétudes que peuvent donner les questions étrangères ne nous paraissent pas expliquer