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Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 49.djvu/1020

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stipulations l’interprétation allemande, on ne voit pas comment il eût été possible au Danemark de les exécuter, comment, après l’invasion du Slesvig, il sera possible à la Prusse et à l’Autriche elles-mêmes de les réaliser.

L’on arriverait tout de suite à une nouvelle phase diplomatique de la question danoise, — à cette phase où la Prusse et l’Autriche seraient obligées de dire ce qu’elles comptent faire, si la proposition annoncée hier à la chambre des communes par lord Palmerston obtenait l’adhésion de la Prusse. L’Angleterre, de concert avec la France, la Russie et la Suède, aurait proposé un arrangement pour l’évacuation du Slesvig par les Danois, : l’île d’Alsen exceptée. On dit que ce projet d’arrangement a déjà l’approbation de l’Autriche ; mais l’on ignore encore comment il sera accueilli par la Prusse. Un arrangement semblable ne peut avoir été mis en avant par les grandes puissances que pour prévenir une nouvelle et inutile effusion de sang. Il équivaudrait à un armistice, et la suspension des hostilités serait sans doute mise à profit par la diplomatie. Il est évident que les puissances qui auraient décidé le Danemark à évacuer le Slesvig auraient contracté envers lui une responsabilité morale, et ne pourraient tarder à interroger la Prusse et l’Autriche sur leurs intentions ultérieures. Si les deux puissances germaniques entendent demeurer fidèles aux engagemens de 1851-52, au nom desquels elles ont pris les armes, si elles respectent la succession dans la maison de Glucksbourg, on ne voit pas, nous le répétons, comment elles pourront concilier les exigences de l’Allemagne avec l’indépendance de la nation danoise. Dans ce cercle, le plus loin qu’elles puissent aller, c’est de ne reconnaître d’autre attache entre la couronne de Danemark et les duchés que le lien personnel du souverain, et de demander un gouvernement commun pour le Slesvig et le Holstein ; mais un pareil résultat, quoiqu’il dût être pour le Danemark un affaiblissement, serait une déception pour l’Allemagne. Ce que l’Allemagne a demandé depuis 1855, ce n’est pas que les duchés fussent séparés de la monarchie danoise, c’est au contraire qu’ils y entrassent en y pesant du poids de trois contre un. Or, si l’on admet que les puissances occidentales, dans leurs incertitudes et leurs timidités, pussent tolérer qu’il n’y eût plus qu’un lien personnel entre la couronne de Danemark et les duchés, on ne comprendrait pas qu’elles pussent consentir à livrer le Danemark à la prépondérance des élémens germaniques. De toute façon, les arrangemens possibles dans l’observation littérale des engagemens de 1851-52 n’auront que la vertu d’expédiens temporaires, et ne seront point des solutions définitives.

La Prusse et l’Autriche iront-elles plus loin ? Après avoir pris les armes pour empêcher la prétendue incorporation du Slesvig au Danemark, voudront-elles accomplir l’incorporation du Slesvig à l’Allemagne ? voudront-elles annexer ce duché à la confédération germanique ? Il serait possible que cette usurpation parût petite au moment où elle s’accomplirait, il serait possible que l’Angleterre et la France, ne sentant point leur force et leur