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Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 57.djvu/24

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les rendre plus souples à sa volonté. Cette croyance superstitieuse, en pleine vigueur au IVe siècle, existait déjà au Ier, d’après le témoignage de l’historien Josèphe. Les contes orientaux sur la magie du plus sage des rois avaient commencé de bonne heure.


III

Bethléem et la crèche les appelaient, — le mystère de la nativité après ceux de la mort et de la résurrection. Ils voulaient aussi, une fois au midi de Jérusalem, dans l’ancien royaume de Juda, en parcourir les lieux les plus renommés. C’était un voyage long et pénible, qui exigeait des préparatifs sérieux ; la petite caravane se réorganisa donc, et sortit de la ville, nous pouvons le supposer, dans, le même attirail qu’elle y était entrée.

Sa première halte fut à un mille et demi d’Ælia, au tombeau de Rachel, situé un peu à droite du chemin de Bethléem. C’est là que l’épouse infortunée de Jacob avait quitté la vie en la donnant à son dernier né, cet enfant qu’elle nomma Bénoni, « le fils de ma douleur, » mais que le père, dans un élan de sainte confiance en Dieu, voulut appeler Benjamin, « l’enfant de ma droite. » Il y eut là sans doute pour la mère si durement éprouvée un moment de retour cruel vers le passé : Jérôme nous la peint debout et silencieuse devant cette tombe qui pouvait répondre à tant de souvenirs. Après quelques instans d’arrêt, donnés à cette muette douleur, Paula reprit sa route, et ils arrivèrent à Bethléem.

La patrie de David, autrefois ville florissante, n’était plus alors qu’un gros village, placé sur la pente d’une colline dont le sommet et le revers opposé avaient été jadis couverts de bois. Ces bois étaient entremêlés de cavernes qui, suivant un usage général en Orient, servaient d’étables aux habitans pour leur bétail, et de retraite, soit aux bergers des environs, soit aux voyageurs attardés. Ce fut dans la plus spacieuse de ces grottes que, durant la nuit qui ouvrit pour le monde l’ère du salut, Joseph et Marie se réfugièrent, ne trouvant pas d’hôtellerie dans la ville, et que naquit le Rédempteur. La caverne de Bethléem resta pour les chrétiens, dès les premiers temps de la prédication évangélique, un objet de vénération et de pieuses visites, jusqu’à ce que l’empereur savant en profanations, Adrien, consacrât les bois et la caverne aux mystères d’Adonis. La grotte qui avait vu naître le Dieu de pureté devint alors le sanctuaire d’un des cultes les plus impurs du paganisme. Il arriva pour la crèche ce qui s’était passé pour le Calvaire : Constantin purifia ce qu’Adrien avait souillé, et l’impératrice Hélène, rendant au culte chrétien la grotte de la nativité, comme elle lui avait rendu celle de la mort, fit construire au-dessus une église qui rivalisa de ma-