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Page:Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 85.djvu/1043

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REVUE. — CHRONIQUE.

roule à Munich, qui n’éclate que maintenant, mais qui se prépare depuis trois ans déjà. Jusqu’ici, le chef du cabinet de Munich, le prince de Hohenlohe, a été assez habile pour pallier ces incohérences. Arrivant au pouvoir après 1866, dans le feu d’une crise publique aussi profonde qu’inattendue, il a subi évidemment une nécessité « impérieuse, il a été ce qu’on pourrait appeler un intelligent et heureux médiateur entre le parti national qui veut à tout prix marcher vers l’unité définitive et complète de l’Allemagne, fût-ce par l’absorption de la Bavière, et ceux qui tiennent avant tout à l’autonomie bavaroise. Il a été un ami de la Prusse, assez Allemand dans sa politique, sans cesser d’être un bon Bavarois. Somme toute, il a esquivé les difficultés, et s’il n’a pas fait beaucoup, il n’a rien compromis. Tant qu’on était près des événemens qui ont créé la situation actuelle, et que le prince de Hohenlohe pouvait compter sur une certaine majorité dans les chambres de Munich, en même temps qu’il avait la confiance entière du jeune roi, tout allait encore assez bien. Depuis quelque temps, tout s’est gâté. Le malaise et l’incertitude qui régnaient dans le pays ont pu être facilement exploités. Les élections dernières sont venues il y a quelques mois, et malgré le soin qu’avait pris le gouvernement de remanier, selon la bonne méthode, les circonscriptions, le scrutin a donné une petite majorité à l’opposition particulariste, qui est arrivée gonflée de sa victoire. Alors la lutte a éclaté en plein parlement, à Munich, dès l’ouverture de la session. Elle a commencé dans la première chambre, où une adresse nettement hostile au ministère a été proposée et adoptée. Quelques-uns des princes de la famille royale ont même donné à cette adresse de méfiance l’appui de leur vote ; mais ici la question s’est étrangement compliquée par l’intervention du souverain, qui a pris fait et cause pour son premier ministre, qui a refusé avec une certaine hauteur de recevoir l’adresse de la première chambre, et qui a même exclu momentanément de la cour les princes assez hardis pour voter avec l’opposition.

Le jeune roi de Bavière, qui est un peu un souverain de conte de fées et qui ordinairement s’occupe plus de musique que d’affaires, s’est réveillé cette fois en sursaut, comme s’il se sentait assailli d’une réalité incommode. Il a montré une irritation extrême, une colère de prince charmant, et il s’est fait un point d’honneur de témoigner ses bonnes grâces aux membres de la première chambre qui sont restés fidèles au ministère, de donner des marques de faveur au prince de Hohenlohe. Cela n’a pas empêché l’opposition de poursuivre sa campagne dans la seconde chambre. Malgré les froncemens de sourcils du roi, les députés ont fait comme les pairs, ils se sont prononcés contre le ministère. À travers certaines contradictions qui tiennent à une situation difficile, l’adresse dit assez nettement que les traités avec la Prusse peuvent donner lieu à des interprétations diverses faites pour jeter l’inquiétude dans le peuple, et que u de là naît le désir de voir imprimer aux affaires