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Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 100.djvu/267

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deviennent visibles en émergeant lors des basses mers et se trouvent souvent, au moment de la pleine mer, trop au-dessous de la surface de l’eau pour être frappées par la quille d’un navire. Ces inconvéniens, aucune puissance maritime ne les possède à un plus haut degré que la France sur son littoral de la Manche.

Il est impossible de décrire le système entier de défense sous-marine employé par nos adversaires pour mettre l’entrée de la Jahde à l’abri d’une attaque. Les Allemands avouent que toutes les bouées et les balises placées à l’embouchure du fleuve jusqu’à 4 milles marins de Wilhelmshaven avaient été remplacées par des torpilles de contact, mais ils ne font aucune allusion aux torpilles électriques coulées auprès de leur flotte et aux environs de leurs batteries. Une brochure prussienne par le des grands dangers que courait l’escadre mouillée devant Wilhelmshaven lorsque les marées et les coups de vent rejetaient dans la Jahde autour des vaisseaux les torpilles de contact placées au large ; elle établit que souvent les navires allemands ont été exposés aux risques d’être détruits par l’explosion de leurs propres engins. Un pareil langage, est-il à peine besoin de le dire ? est rempli d’exagération ; en admettant que le choc d’une torpille poussée par la marée contre un navire fût suffisant pour déterminer une explosion, comment des marins appelés à se garer dans une rivière des tentatives d’un brûlot, qui représente une masse bien autrement importante qu’une torpille, seraient-ils embarrassés pour se préserver du choc de celle-ci ?

Nous ne voulons pas prolonger cette dissertation sur l’importance des défenses sous-marines. Les gens compétens n’ont besoin d’aucune explication pour se rendre compte des difficultés qu’aurait présentées l’opération maritime de forcer l’entrée de la Jahde, si les événemens désastreux dont la France était le théâtre n’avaient ramené naturellement la marine à son rôle primordial, celui d’une croisière contre le commerce et d’un blocus des ports allemands. Le résultat de la croisière peut être défini d’un mot : interruption entière du commerce de l’Allemagne avec le reste du monde. Les navires allemands réfugiés sur les rades étrangères y attendirent la fin des hostilités sans vouloir s’exposer aux chances de la mer ; ni chargeurs, ni assureurs du reste ne s’offrirent pour tenter les risques de quelque campagne commerciale. Les paquebots d’Amérique interrompirent leur navigation, et vinrent s’abriter dans le port de Southampton. Aux Açores, jusque dans les mers du Japon, les navires de guerre allemands restèrent fidèles au rôle qu’ils semblaient s’être imposé, celui d’éviter une rencontre maritime. L’Arcona, chassée par le Montcalm dans la rade de Horta, ne voulut