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Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 102.djvu/25

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population de Paris contre les égorgeurs de Versailles ; » ils nous la donnent encore trop souvent lorsque leurs chroniqueurs salariés dénoncent à l’étranger les armemens de la France. Le jour où notre malheureuse patrie serait obligée de se jeter dans les bras de l’empire pour échapper à la commune, ou ne pourrait se délivrer de l’empire qu’en tombant dans la commune, c’en serait fait d’elle pour toujours. En ce moment, ces deux grands fléaux de la société française sont également vaincus ; nous ne redeviendrons leur proie que si nous le méritons.


II

Qui donc pourra imposer silence à nos divisions ? Qui pourra réunir sur un terrain commun tous les hommes « de paix et de bonne volonté, » comme dit l’Écriture ? Nous venons de le voir, ce ne sera ni la légitimité, ni l’orléanisme, ni la république radicale. Quant à la démagogie sous toutes ses formes, c’est justement le fléau qu’il s’agit d’éviter. Il faudra donc que ce soit un parti nouveau ; mais lequel encore ? Le pays est contraire à toute apparence de restauration monarchique et contraire à toute apparence de désordre ; il est profondément conservateur, et il penche visiblement vers la république. Il n’y a donc plus qu’un gouvernement possible, celui de la république conservatrice. Voilà le nouveau parti qu’il s’agit de fonder et qui peut seul nous mettre d’accord.

C’est ici que les anciens partis se récrient ; ils affectent de ne pas nous comprendre. Qu’est-ce donc, disent-ils, que cette république conservatrice, sinon une alliance de mots contradictoires et une misérable équivoque ? Si ce n’est une « ruse de guerre, » c’est une « duperie » et une bêtise. C’est le cheval de Troie par où le parti conservateur introduira l’ennemi dans nos murs. Quand l’épithète aura servi de passeport au substantif, on la mettra de côté, et l’on ne trouvera au fond de la république conservatrice que la république radicale. En quoi d’ailleurs cette nouvelle forme de gouvernement consiste-t-elle, en quoi diffère-t-elle de toute autre république ? Les radicaux la traitent eux-mêmes comme un masque de circonstance qu’ils vont arracher bientôt de leur visage, et dont ils ont hâte de se délivrer. Les parlementaires ajoutent que c’est une mystification sciemment combinée pour servir la politique personnelle de M. Thiers et faire accepter à la France le pouvoir d’un seul homme.

Eh bien ! malgré ces agréables railleries, la république conservatrice fait son chemin, et ces deux mots si simples contiennent tout l’avenir de la France. Le pays, qui n’est point subtil, n’a pas