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Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 102.djvu/329

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Bientôt un autre enseignement était appelé à prendre une place considérable dans nos études : ce fut l’enseignement de l’histoire. Considéré jusqu’alors comme un appendice aux classes latines, borné presque exclusivement à l’histoire ancienne, cet enseignement fut confié à des professeurs spéciaux : il eut son indépendance, son individualité ; et se développa sur une large échelle ; d’abord s’arrêtant à Louis XIV, il fut ensuite poussé jusqu’à la révolution, puis jusqu’en 1815 ; récemment enfin on l’a continué un peu imprudemment jusqu’à nos jours. On vient de le faire rétrograder jusqu’en 1848 : cela est suffisant ; mais c’est encore, il faut le reconnaître, une bien vaste carrière ; Ce n’est pas tout : les sciences, qui dans l’idée primitive devaient se borner aux mathématiques et, suivant les traditions de l’ancien régime, être ajournées à la fin des cours, les sciences réclamèrent une part plus large, non-seulement pour la préparation aux écoles spéciales, mais dans l’enseignement littéraire lui-même. Il fallut que toutes fussent enseignées : histoire naturelle, physique, chimie, cosmographie, s’ajoutèrent aux mathématiques, et s’introduisirent classe par classe à côté de l’histoire au cœur des langues anciennes, auxquelles elles prirent nécessairement une portion de leur temps. Un autre besoin se fit bientôt sentir, celui des langues vivantes. Il parut impossible, comme autrefois, de les exclure absolument. On leur fit une place telle quelle entre les classes ; on les réduisit à la portion congrue ; elles furent facultatives et non obligatoires. Néanmoins, si réduites qu’elles fussent, elles prenaient encore une part sur la somme des heures, toujours la même, dont les enfans pouvaient disposer ; elles partageaient nécessairement l’attention et la force de travail des écoliers.

Je crois que l’on peut encore compter parmi les nécessités nouvelles de l’université moderne l’étude et l’analyse de nos classiques français. Il est évident que cette étude était nulle au XVIIe siècle. Racine et Boileau ne durent pas avoir de modèles français à lire dans les classes, car c’étaient eux-mêmes qui devaient être plus tard les classiques. Quoique Rollin, dans son Traité des études, conseille déjà la lecture de nos grands écrivains, la part du français dans, université du XVIIIe siècle ne dut pas être grande, si nous jugeons, par nos propres souvenirs de classe, de ce qu’elle était il y a trente ans. C’est seulement en 1840 que M. Cousin introduisit les auteurs français dans le programme du baccalauréat ès-lettres. Ils eurent dès lors ou durent avoir une place officielle dans notre enseignement ; si faible que soit cette part, et il serait à désirer qu’elle fût beaucoup plus grande, c’est cependant une étude de plus que nos pères n’ont pas connue. N’oublions pas maintenant la part très grande aussi et très nécessaire