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Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 102.djvu/815

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de la soirée. Ils ne mangent que les jeunes pousses des arbres, des fleurs et des baies ; destinés à vivre dans des lieux où la sécheresse est extrême, ils boivent à peine, un peu de la rosée de la nuit déposée sur les feuilles leur suffit. En captivité, lorsqu’on leur présente à boire, ils se contentent de passer la langue sur les parois du vase, et, si leur nez vient à toucher l’eau, ils se retirent avec des marques d’effroi. Les sifaks, ayant comme toutes les espèces du même genre les membres antérieurs très courts, sont incapables de marcher à quatre pattes ; à terre, dressés sur les pattes de derrière, ils avancent par bonds, les bras en l’air, à la façon des enfans qui sautent à pieds joints. Ils ne sont en possession de tous leurs avantages physiques qu’au milieu des bois, sur les branches des arbres. On voit des femelles, portant leur petit sur le dos, s’élancer à plus de dix mètres sans effort apparent.

Après cinq jours d’excursions jusqu’à une dizaine de lieues au nord du cap Sainte-Marie, n’ayant vu partout qu’un pays plat, aride et sablonneux, notre compatriote dut retourner au rivage ; un avis l’informait que le navire s’était éloigné. En effet, arrivé au sommet des dunes, il n’aperçoit aucun bâtiment sur la rade. Quelques Antandrouïs venus à la côte pour vendre leur récolte d’orseille disent que des étrangers ont été abandonnés sur le rivage ; c’était vrai, — des hommes mis à terre n’avaient pas eu le temps de remonter à bord, le navire ayant été forcé de gagner au plus vite la haute mer pour se soustraire au péril dont le menaçait un raz de marée. Pendant six jours, les malheureux Français, le cœur serré devant la perspective de rester indéfiniment chez les Antandrouïs, montent cent fois sur les dunes sans découvrir une voile ; pour comble de misère, les provisions manquent. Enfin la joie renaît ; le navire est en vue, il avance rapidement, il mouille à une assez grande distance des rochers ; malgré l’état de la mer, fort peu rassurant, deux Malgaches se jettent dans une pirogue pour aller demander des vivres. Au retour, le frêle esquif chavire, les hommes se sauvent à la nage ; mais les vivres attendus avec une fiévreuse impatience sont engloutis : c’est encore un jour de souffrance. Un peu de calme survient, on en profite, tout le monde s’embarque ; presque aussitôt le navire partait pour Masikoura.

Du cap de Sainte-Marie à la limite du pays des Antandrouïs, la pointe Barlow, indiquée sur toutes les cartes, la côte est absolument déserte. Ici commence le territoire des Mahafales ; on ne trouve encore qu’un seul petit village avant d’atteindre l’embouchure de la rivière Masikoura, qui, aux époques de sécheresse, se perd dans les sables. Sur ce point, il existe un centre de population, centre d’un commerce analogue à celui dont les Antandrouïs ont offert un