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Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 102.djvu/96

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Par lettres patentes enregistrées au parlement le 16 mai 1724, et à la chambre des comptes le 13 juin suivant, le roi déclara « affecter à perpétuité l’hôtel de Nevers au logement de sa bibliothèque, » sauf à réserver pour des services tout différens les bâtimens sur la rue Neuve-des-Petits-Champs les plus rapprochés de la rue Vivienne ou, si l’on veut, le palais Mazarin proprement dit[1]. Tout embarras avait donc cessé dans le présent comme toute crainte pour l’avenir. Bientôt les grands travaux d’aménagement et de décoration intérieure entrepris sous l’habile direction de l’architecte Robert de Cotte allaient achever de régler le sort de l’édifice livré à la Bibliothèque et d’en fixer la destination.

Qu’advint-il du cabinet des estampes durant cette première période d’agitation et pendant les années qui suivirent ? Quelle place trouva-t-il d’abord sur ce terrain disputé, quel fut son lot un peu plus tard dans la répartition des locaux définitivement abandonnés à la Bibliothèque ? Il semble d’autant moins superflu d’examiner la question qu’elle a été jusqu’à présent négligée ou incomplètement éclaircie, faute des documens authentiques qu’un heureux hasard a mis entre nos mains.

On a vu que la constitution du cabinet des estampes en un département séparé de la collection des livres avait à peu près coïncidé avec la translation de la Bibliothèque tout entière dans les salles de l’hôtel de Nevers. Le moment, certes n’était pas favorable à une organisation méthodique des recueils composant le nouveau département, ni même à un simple rangement matériel dans un espace convenablement préparé. Au lendemain de l’espèce de coup d’état par lequel on s’était emparé de l’hôtel de Nevers, ce que l’on prétendait seulement, ce que le garde des estampes voulait comme chacun de ses collègues, c’était faire ouvertement, rapidement, acte de possession et se fortifier en quelque sorte contre les agressions par la quantité même et la masse des objets une fois apportés. Aussi ne prit-on guère le temps de choisir, pour loger les planches gravées et les estampes, ce qui présenterait les meilleures conditions au. double point de vue du classement à établir et des communications à faire sur place. On entassa le tout dans quelques chambres au premier étage, entre l’appartement de l’abbé Bignon

  1. L’usage de consacrer ces bâtimens à des établissemens financiers se continua jusqu’à une époque assez rapprochée de nous. Après avoir été occupés par les bureaux de la Compagnie des Indes, ils servirent d’abri à la Bourse. Plus tard, on y installa le Trésor, et, sous la restauration, pendant le ministère Villèle, l’administration centrale des finances y résidait encore. En 1828 seulement, le palais Mazarin reçut la même destination que l’hôtel de Nevers, attribué depuis plus d’un siècle déjà aux collections de la Bibliothèque.