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Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 99.djvu/217

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LEGENDES HUMORISTIQUES
D'UN CONTEUR ALLEMAND

Sieben Legenden, von Gottfr. Keller. — Stuttgart, Göschen. 1872.

Les innombrables légendes que le moyen âge a vues éclore à l’ombre des monastères offrent parfois un singulier mélange de mysticisme chrétien et de réminiscences païennes. Dans bon nombre de ces poétiques fictions, on démêle encore sans trop de peine les souvenirs classiques ou l’écho lointain des mythes Scandinaves, et l’on y rencontre plus d’un saint d’origine fort suspecte. La plupart probablement sont dues à cet auteur anonyme qu’on appelle le peuple, et n’ont été fixées qu’après bien des transformations, subies pendant qu’elles passaient de bouche en bouche comme les chansons et les proverbes. L’âme populaire, naïve et impatiente, crée, façonne, rapproche ses types sans s’attarder au pourquoi des choses ; comme le rêve, elle se moque de l’unité de temps et de lieu, et même de l’unité des caractères. Les événemens sont audacieusement juxtaposés, les motifs psychologiques ne se devinent pas toujours ; incidens et actions manquent souvent de vérité poétique, et se montrent presque aussi invraisemblables que la vie réelle. Ou voudrait pourtant expliquer l’imprévu, faire accepter l’incompréhensible, et l’on a recours à l’intervention des puissances surnaturelles. Le monde des légendes vient remplacer l’antique mythologie pour satisfaire ce besoin du merveilleux qui n’est qu’un secret besoin d’atténuer les surprises de la réalité.

Dans ces dernières années, la poésie légendaire a donné lieu à