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jusqu’à atteindre en juin 1870 le chiffre de 720 millions, dont 54 pour la caisse d’épargne de Paris.

En juillet 1870, aussitôt après la déclaration de guerre, la caisse d’épargne de Paris, où le contre-coup des événemens politiques se fait toujours le plus sentir, vit les demandes de remboursement en espèces et d’achats de rente grossir du simple au double et au triple. La baisse des fonds publics engageait beaucoup de déposans à profiter de la loi de 1845, qui leur permet de se faire acheter sans frais des rentes avec leurs dépôts, placement qui leur était alors en effet très avantageux. Dans les cinq semaines du mois de juillet, les achats de rentes pour compte et sur demande des déposans sont de 45,816 fr., 44,334 fr., 68,255 fr., 114,022 fr. et 145,848 fr., les remboursemens en espèces de 316,576 fr., 368,669 fr., 439,753 fr., 805,483 fr. et 1,018,981 fr. Dans ce mois, les versemens hebdomadaires diminuent beaucoup : de 334,506 fr. Ils descendent à 224,238 fr. Dans le mois d’août, les achats de rentes sont moins demandés ; ils ne sont plus par semaine que de 102,431 fr., 56,302 fr., 33,676 fr., 28,944 francs ; mais les remboursemens en espèces grossissent jusqu’à s’élever dans la semaine du 20 août à près de 2,300,000 francs. Chacun se munissait d’argent par précaution ; c’était d’ailleurs le moment de l’emprunt d’état de 800 millions, et l’on sait que les déposans prennent volontiers leur bonne part aux emprunts de l’état, que leur concours, souvent considérable, aide beaucoup au classement rapide des titres dans les souscriptions nationales ; les retraits ne sont alors pour le trésor qu’un changement de main. Pendant ce mois d’août, par le fait de l’emprunt, et bientôt après par la nouvelle de nos premiers désastres militaires, les versemens diminuent rapidement, de 238,854 fr. à 63,084 fr.

Survient la révolution du 4 septembre : les remboursemens, qui étaient de 1,186,031 fr. dans la semaine précédente, s’élèvent à 1,413,751 fr., et les versemens diminuent toujours. Les déposans affluent aux guichets du remboursement ; au souvenir de la panique de 1848, on craint de revoir aux abords de la caisse d’épargne ces foules inquiètes, ces queues de réclamans, qui avaient alors si péniblement frappé les hommes d’ordre et de sage progrès. Le gouvernement de la défense nationale eut l’idée malheureuse de rééditer le décret du 9 mars 1848, et de le faire pire encore : il limita le remboursement en espèces, non plus même à 100 fr., mais à 50 fr. seulement, offrant d’ailleurs, comme en 1848, le reste en bons du trésor. Ce décret, renouvelé des gouvernans provisoires de 1848, porte la date du 17 septembre, avant-veille de l’investissement de Paris.

À ce moment, je revenais d’Angleterre, où pendant une mission relative à des questions d’économie industrielle et financière j’avais eu lieu de m’entretenir au sujet des caisses d’épargne avec quelques-uns des hommes d’état anglais qui ont le plus d’expérience et d’autorité dans les institutions de prévoyance. La question du remboursement des dépôts