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Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 99.djvu/962

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vait, dans la pensée de l’auteur, qu’une discussion théorique de deux systèmes, le système en quantité et le système en valeur, et n’avait pas en vue le système complexe adopté par le département de la marine. Il a établi cette vérité incontestable, que le système-valeur, lorsqu’il est uniquement et exclusivement employé, peut donner lieu à des substitutions ; mais, en ce qui concerne la marine, il avait indiqué quelques lignes plus haut que, dans les ports et autres établissemens, la comptabilité du magasin et de l’atelier était tenue par quantité. Il est donc évident que les critiques adressées au système-valeur ne sont pas applicables à la comptabilité de la marine.


BOUCHARD.



ESSAIS ET NOTICES.
La Chanson de Roland, nouvelle édition, par M. Léon Gautier, professeur à l’École des chartes, avec une introduction historique et eaux-fortes de M. Chifflard.


En ces temps de fièvre et d’incertitudes, après ce foudroyant tumulte qui, tous, nous a plus ou moins arrachés à nos travaux, à notre vie et à nous-mêmes, ce n’est pas sans quelque effort qu’on peut se retourner vers les sphères sereines de l’érudition, de l’histoire et de la littérature. Et cependant n’est-ce pas encore servir son pays que de chercher à lui conserver, au moins dans le domaine de la science et de la pensée, la place qu’une guerre funeste lui a fait perdre sur les champs de bataille ? Lorsque M. Léon Gautier, achevant son Introduction à la chanson de Roland, entendait siffler autour de lui les obus du bombardement prussien, il pouvait se dire que, lui aussi, avec ses armes de savant, il prenait part à la lutte contre ce peuple envahissant et jaloux, notre rival en érudition comme en suprématie.

Plût à Dieu que notre pauvre pays, en littérature comme en guerre et en politique, comptât beaucoup de champions aussi consciencieux, disons le mot, — aussi enthousiastes que M. Léon Gautier. C’est là en effet ce qui distingue particulièrement le savant professeur de l’École des chartes ; c’est sa chaleur de conviction, c’est sa foi profonde dans le culte du beau et du vrai. L’érudition chez lui n’est point l’art de bâtir sur des pointes d’aiguilles et de grossir sans mesure les infiniment petits. Sa science, sans être moins exacte et moins consciencieuse, est plus large, par cela même plus communicative. Travailleur infatigable, M. Léon Gautier s’est déjà conquis, avec les couronnes académiques, l’estime du public savant et lettré par son ouvrage considérable sur les épopées françaises. Aujourd’hui, dans un cadre plus restreint, il aborde un sujet qui n’est guère moins grandiose, et ne fait preuve en tout cas ni de moins de labeur, ni de moins de mérite. Faire une édition d’un vieux conte, et surtout d’un poème aussi célèbre que notre Roland, cela