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Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 104.djvu/341

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de classe de 400 à 700 roubles. Le traitement des maîtres et maîtresses est établi d’une tout autre façon : ils reçoivent, pour toute l’année scolaire, pour chaque heure de leçon par semaine, 25 roubles dans les classes inférieures, 50 dans les supérieures. Pour se constituer un traitement annuel de 200 roubles seulement, il faut donc que les maîtresses des premières classes donnent quatre leçons par semaine, celles des classes inférieures huit heures. Un maître des classes supérieures qui enseignerait vingt heures par semaine, comme font nos professeurs de lycées dans les classes de grammaire, arriverait à un traitement de 1,000 roubles ; une maîtresse de seconde classe en s’imposant le même travail, n’arrive qu’à 500 roubles par an. C’est bien peu pour Saint-Pétersbourg, où la vie est plus chère qu’à Paris. Une maîtresse de cette classe qui aurait des charges de famille un peu lourdes devrait donc professer non pas vingt heures par semaine, ce qui est beaucoup, mais trente ou quarante heures, ce qui dépasse les forces humaines. Il faut encore consacrer beaucoup de temps chez soi à corriger les devoirs des élèves. Aucun gymnase ne peut donner plus d’une vingtaine d’heures de leçons à une de ses maîtresses, fût-elle dans la situation de famille la plus digne d’intérêt. Celles qui ont besoin d’un supplément de traitement sont donc obligées d’aller à de longues distances chercher quelques heures de leçons, ou dans un autre gymnase, ou dans un établissement quelconque. On se figure la vie de quelques-unes de ces jeunes filles disgraciées de la fortune, vie de dévoûment, de privations, de labeur accablant. Toutes n’en sont pas, là ; parmi les maîtresses de gymnase, il y en a qui au contraire cherchent à ne pas se laisser trop absorber par ce travail matériel. Aucun règlement n’exclut les femmes mariées ; c’est la nature même des choses qui les éloigne. Une femme qui a une maison à tenir et des enfans à surveiller ne peut plus s’astreindre, à un travail qui, régulièrement et à des heures fixes, l’oblige à de longues absences.


III

Un gymnase comprend sept classes plus une école préparatoire ; on demande déjà beaucoup à une fillette de huit ans qui a l’ambition d’être élève de septième : il faut connaître la numération, savoir lire et écrire non-seulement en russe, mais en français et en allemand. On voit que les Russes s’y prennent de bonne heure pour faire apprendre à leurs enfans les langues vivantes. Est-il étonnant qu’ils soient de tous les peuples, — sans en excepter les Allemands, — celui qui parle le plus de langues, et qui les parle le mieux ? On pourrait traverser toute l’Allemagne sans entendre