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Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 104.djvu/351

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d’il y a quarante ans ; il remplace la robe pour les professeurs comme pour les magistrats ; on fait la classe, l’on juge, l’on plaide en habit. Parfois aussi, on voit un bon pope à la grande barbe de patriarche, à la figure large et réjouie, avec son chapeau rond, son long caftan brun, le livre sacré sous son bras, appuyé sur sa canne à pomme d’ivoire. Cinq minutes sont bientôt écoulées, et déjà le vétéran aux chevrons d’or fait retentir une sonnette dans les salles ou les corridors, — à moins pourtant que ce ne soit la récréation de midi ; alors on déjeune, on ouvre les paniers aux provisions, et les pupitres de travail se transforment en tables frugales. Dans certains gymnases, on a même installé un buffet où l’on peut avoir une tasse de bouillon ou de chocolat.


IV

Telle est dans ses traits essentiels l’organisation des gymnases russes. Il y a des gymnases féminins dans d’autres pays ; mais nulle part peut-être on ne les a constitués dans de si vastes proportions et sur un plan aussi général ; nulle part l’état ou le souverain n’a témoigné pour eux une si grande sollicitude. Le personnel des gymnases est considéré comme relevant de la couronne ; il a droit à tous les avantages accordés aux serviteurs de l’état, — pensions de retraite, promotions de tchin, collations d’ordres. Il ne se passe guère de mois sans que plusieurs professeurs soient nommés conseillers auliques ou conseillers titulaires. C’est un décret rendu par l’empereur, par le goçoudar imperator lui-même, qui décide par exemple qu’au Vassili-Ostrof il y aura une classe parallèle et une dame de classe de plus. C’est dans le palais même du prince d’Oldenbourg qu’a lieu la distribution solennelle des récompenses pour tous les gymnases. En 1872, l’impératrice n’a pas pu y assister personnellement, mais elle a voulu affirmer ses sympathies envers l’institution en envoyant un télégramme de Livadia, où elle se trouvait alors, pour féliciter les élèves qui sortaient du gymnase et leur faire ses souhaits de bonheur à leur entrée dans la vie.

L’instruction des femmes est aussi affaire capitale pour l’opinion publique. Rien ne saurait plus arrêter le mouvement de diffusion de ces gymnases. Le nombre des demandes d’admission s’est accru dans de telles proportions que l’on complète partout ceux qui n’avaient pas le nombre de classes réglementaire, et qu’il faut songer à en créer de nouveaux. Les gymnases ont maintenant leur presse à eux, des livres et des manuels rédigés spécialement pour eux,