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Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 104.djvu/996

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malgré les difficultés qu’il a fallu vaincre d’abord, malgré les conditions déplorables dans lesquelles la plupart des émigrés se sont dirigés sur l’Afrique, leur installation est aujourd’hui achevée, grâce à la bonne volonté de l’administration et au zèle admirable déployé par les sociétés d’assistance et de protection. Le soi est fertile, et le climat n’a rien qui puisse effrayer les colons ; l’avenir paraît donc assuré pour tous ceux qui viendront en Algérie avec la résolution de travailler. C’est ce qui ressort du rapport très-circonstancié de M. Guynemer, qui vient de visiter presque tous les établissemens d’Alsaciens-Lorrains en Algérie, comme délégué de la société présidée par M. le comte d’Haussonville.

Le seul desideratum signalé par le rapport concerne les habitations. Les familles, à leur arrivée dans les villages, étaient d’abord logées sous des tentes, abri insuffisant pour les femmes et les enfans ; plus tard le gouvernement fit construire des gourbis en pierre, mais dans la plupart des villages ces gourbis sont trop petits et mal couverts. Aussi est-ce à la construction de maisons définitives que M. Guynemer crut devoir affecter la plus grande partie des subventions allouées par la société, et c’est sur cette question qu’il appela la sollicitude de M. le gouverneur-général, qui s’empressa d’ouvrir à cet effet un crédit de 100,000 francs au préfet d’Alger. Il a été décidé ensuite que les constructions projetées seraient exécutées sous la direction du génie militaire, et dans ces conditions une maison qui reviendrait à 2,000 ou 2,300 francs, si elle était bâtie par un entrepreneur civil, n’en coûtera que 1,500. Il faut ajouter qu’ainsi on n’aura plus à craindre l’abandon des travaux ou les retards qui se produisent si souvent par suite du manque d’ouvriers ou de la négligence des entrepreneurs. Toutes ces maisons pourront être terminées dans un bref délai. Des dispositions semblables ont été prises pour les provinces d’Oran et de Constantine. Les émigrans trouveront donc à l’avenir leur installation toute préparée, surtout s’ils se conforment à l’avis du sous-comité d’Alger, qui leur conseille de retarder leur départ jusqu’à la fin de septembre, afin de leur éviter l’épreuve des grandes chaleurs. Au reste, le mouvement d’immigration tend à s’accroître, et l’avenir de la colonie inspire une confiance entière à tous ceux qui l’ont vue de près. On ne se fait pas en général une idée assez juste des ressources que peut offrir l’Algérie à des colons résolus et intelligens. « En voyant, dit M. Guynemer, tant de villes et de villages de construction européenne, tant de fermes dont les propriétaires, arrivés sans fortune, ont trouvé l’aisance et quelquefois la richesse, j’ai compris combien l’Algérie était peu connue en France. »


C. BULOZ.