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la paroisse, les inspecteurs des pauvres saisissaient leurs biens, et en assignaient le produit à l’élève et à l’éducation de l’enfant, qui tombait à la charge de la paroisse. L’humanité, dit Blackstone, a engagé la loi à recevoir la déclaration des mères un mois après la naissance de l’enfant, mais cette tolérance a été souvent fort à charge aux paroisses en ce qu’elle donnait au père le temps de s’échapper -pour aller vivre ailleurs[1]. Des modifications ont été introduites dans cette législation par la loi des pauvres de 1834. La mère a été rendue exclusivement responsable de l’entretien de l’enfant naturel dans le cas où elle en aurait les moyens ; dans le cas contraire, il y est pourvu aux frais de la paroisse, et celle-ci est autorisée à poursuivre à l’effet d’obtenir des alimens pour l’enfant l’individu dont la mère dénonce la paternité. Toutefois cette déclaration seule n’est pas jugée suffisante ; il faut qu’elle soit appuyée par un témoignage étranger et à la satisfaction des juges (it shall be corroborated in some material particular by other testimony to the satisfaction of the court). Parmi les motifs invoqués en faveur de ces restrictions, il faut noter d’abord cette considération financière, que les dépenses des paroisses étaient plutôt augmentées que diminuées par suite des frais qu’occasionnaient les poursuites toujours incertaines en reconnaissance de paternité, ensuite cette autre considération, où se trahit l’influence des doctrines auxquelles Malthus avait attaché son nom, que la rigueur excessive de la loi provoquait des mariages précoces et réprouvés par la prudence, parce que le père de l’enfant naturel se décidait souvent à épouser la mère pour se libérer de l’emprisonnement et de la poursuite en reconnaissance. Il faut avouer que cette dernière considération était plutôt recommandable sous le rapport économique, — il s’agissait, ne l’oublions pas, dans cette enquête, des moyens de prévenir la multiplication des pauvres, — que sous le rapport moral. Le remède proposé pouvait être bon pour empêcher la multiplication excessive des enfans légitimes, mais l’était-il au même degré pour empêcher celle des enfans illégitimes ?

Aux États-Unis, en Suisse et dans le plus grand nombre des états de l’Allemagne, la recherche de la paternité est autorisée, mais avec des précautions destinées à prévenir les abus que dénonçait si éloquemment l’avocat-général Servan. En Bavière, le code Maximilien par exemple déclare que la simple dénonciation de la mère n’est pas une preuve suffisante contre le père, si elle n’est appuyée sur d’autres indices constans et dignes de foi. Le code général des

  1. Blackstone, Commentaires sur les lois anglaises, t. II, chap. VIII. — Des Parens et des Enfans.