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de quelques heures, si le chenal est d’un accès facile ; c’est un trajet qui rapproche la marchandise du consommateur sans augmenter le prix du fret. Par ces divers motifs, c’est à l’intérieur des rivières plutôt que sur le littoral que se sont créés les principaux ports de commerce. Le Havre est à cet égard une exception dont on ne citerait guère d’autre exemple. Il eût donc été presque impossible, l’eût-on voulu sérieusement, de remplacer Nantes par Saint-Nazaire ; l’amélioration de la Basse-Loire s’imposait alors comme une œuvre de première nécessité.

On crut qu’il suffisait d’imiter ce que l’on avait déjà fait sur la Seine en aval de Quillebeuf, c’est-à-dire d’endiguer le chenal entre Nantes et Paimbœuf en vue de maintenir les courans de flot et de jusant dans un espace restreint. Les ingénieurs espéraient obtenir de cette façon une profondeur de 5 mètres ; ils n’en eurent même pas Il par les marées, de vive eau. Le fond du lit, composé d’un dépôt diluvien d’une grande dureté, ne se creuse pas sous le courant. Les mouvemens de flux et de reflux s’alanguissent dans le dédale d’îles et de faux bras dont la Loire est encombrée aux abords de Nantes. comme en outre le fleuve charrie d’énormes masses de sable arrachées aux berges qu’il ronge dans)le haut du bassin, des atterrissemens se sont produits en aval des digues au point de compromettre la navigation dans la partie de l’estuaire réputée jusqu’alors la plus sûre. Ainsi la méthode d’endiguement qui réussit sur la Seine et sur la Gironde échoue dans la Loire. L’amélioration des embouchures est un problème complexe, on le voit, qui trompe souvent les prévisions des ingénieurs les plus expérimentés.

Revenons à la Seine pour résumer en quelques lignes les travaux dont elle a été l’objet ; ces travaux méritent en effet de servir de type pour montrer en quoi consiste la canalisation complète d’une rivière depuis ses sources jusqu’à la mer. Que trouve-t-on sur ce magnifique cours d’eau qui, des montagnes du Morvan à la Manche, transporte tant de richesses, arrose un si riche pays ? Dans le bas, où la marée se fait sentir, des digues longitudinales empêchent le chenal de divaguer au milieu des bancs de sable ; au-dessus, de Rouen à Auxerre, des barrages mobiles avec écluses soutiennent le niveau d’étiage, mais s’effacent au moment des crues ; vers le haut du bassin, des voies artificielles, le canal de Bourgogne et celui du Nivernais, reçoivent les bateaux, les conduisent d’écluse en écluse sur le versant de la Saône ou sur celui de la Loire. Parfois, comme à Paris, lorsque le fleuve offre des passes difficiles ou décrit un long circuit, on a rejoint les deux branches par une dérivation éclusée. En dehors de la partie maritime, on n’a construit nulle part de digues sur les bords ; tout au plus consolide-t-on les berges lorsqu’elles