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Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 25.djvu/616

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en fonctions, il n’a joué absolument que ceux-là même qu’il n’avait pas le droit d’accueillir, l’administration des beaux-arts peut répondre : « Nous n’y pouvons rien. Y a-t-il un directeur des théâtres ? Non ; il n’y a qu’un directeur des beaux-arts, qui ne s’occupe que de la peinture. Quant au ministre, il est si incertain du lendemain qu’il ne veut pas se faire d’ennemis et laisse aller les choses. » Aussi la critique se plaint ; la commission des auteurs dramatiques se plaint ; tout le monde se plaint : rien n’y fait. Le directeur de l’Odéon ne s’occupe de rien. Il sait que, grâce à la liberté des théâtres, l’administration des beaux-arts est presque désarmée, et que depuis nombre d’années les cahiers des charges n’existent que pour n’être pas respectés.

La question est importante, on le voit, et porte sur des points bien différens ; elle serait déjà résolue, si la politique n’absorbait pas les esprits. Il nous semble cependant qu’on pourrait aisément instituer une commission comme celle dont nous avons parlé, et où seraient appelés les hommes, du métier dont l’opinion ferait poids dans la matière. Et une fois la liberté illimitée des théâtres supprimée, cette commission aurait à s’occuper d’une autre question non moins grave, non moins importante, et qui touche à la vie même du théâtre, c’est-à-dire des cafés-concerts. On en parle beaucoup, et on les connaît peu ; d’aucuns s’imaginent même que le café-concert et le théâtre étant deux entreprises absolument distinctes n’ont entre eux aucune connexité ; il est aisé de prouver le contraire, car, si l’on ne se hâte de remédier au mal, la phrase de Joseph de Maistre sera vraie une fois encore, et ceci tuera cela.


II

En proclamant la liberté des théâtres par le décret du 6 janvier 1864, le gouvernement n’entendait pas abdiquer son droit de haute surveillance sur les autres établissemens publics. L’article 6 du décret disait : « Les spectacles de curiosités, de marionnettes, les cafés dits cafés-chantans, cafés-concerts… restent soumis aux règlemens actuellement en vigueur. » Quelques mois après, le 1er juillet 1864, l’article 68 d’une ordonnance de police réglait définitivement la question dans les termes suivans : « Sont astreints comme par le passé à notre autorisation préalable, et par conséquent laissés en dehors de la présente ordonnance, les cafés-concerts et cafés dits chantans, où les exécutions instrumentales et vocales doivent avoir lieu en habit de ville, sans costumes ni travestissemens, sans décors, et sans mélange de prose, de danse et de pantomime. » Cette