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L’eau de mer étant mauvaise conductrice du calorique, la température de la surface est moins variable que celle de l’atmosphère ; aussi l’influence des saisons ne s’y fait-elle pas sentir à plus de 100 mètres de profondeur, et dans cette zone les variations diurnes se manifestent-elles très lentement. La distribution de la chaleur dans le sens vertical y est beaucoup plus compliquée que sur terre. Tandis que, dans l’atmosphère, la température décroît à mesure qu’on s’élève, dans la mer, elle décroît à mesure qu’on descend. Cette différence est due à ce que, la densité de l’eau augmentant jusqu’à — 2° 22, les couches les plus froides tendent à s’enfoncer. Les couches superficielles s’échauffent pendant le jour, mais elles se refroidissent pendant la nuit, et, devenant alors plus pesantes que celles qui se trouvent au-dessous d’elles, elles prennent leur place et produisent ainsi un mouvement vertical du liquide dans toute la partie impressionnée par la chaleur solaire. C’est ainsi que, sous les tropiques, la température de l’air étant de + 32 degrés, celle de la surface de la mer est de + 24 degrés, et celle de l’eau à 1,500 mètres de profondeur de + 4° 17. Vers les pôles, la température s’accroît, au contraire, de la surface au fond, puisque la température atmosphérique est plus froide que celle de l’eau. A une profondeur variable suivant les climats et les courans, on rencontre dans toutes les mers une couche d’eau à la température constante de + 4° 17, qui, partant à l’équateur d’une profondeur de 2,200 mètres, va en s’élevant progressivement jusque vers le 56° degré de latitude nord et sud, où elle affleure la surface, pour redescendre ensuite en se rapprochant des pôles, et décrit ainsi une immense courbe à peu près symétrique dans les deux hémisphères. Dans nos mers, cette zone isotherme se rencontre à 800 mètres de profondeur dans l’océan, au sud du golfe de Gascogne, à 400 mètres dans la Manche, à la surface dans le Pas de Calais et la mer du Nord ; elle redescend ensuite jusqu’à 1,350 mètres au 70e degré de latitude. Dans la Méditerranée, elle varie entre 950 mètres et 1,445 mètres.

La lumière solaire ne pénètre pas dans l’eau à plus de 150 mètres ; mais les fonds plus profonds ne sont pas pour cela plongés dans une obscurité absolue, car un grand nombre des animaux qui les habitent sont doués de phosphorescence.

Le fond des mers a le même relief que le continent et présente comme lui des plateaux, des vallées, des montagnes et des pics. Il est lui-même ou un continent englouti comme l’Atlantide, ou un continent en voie de formation qui quelque jour surgira du sein des flots. La profondeur en varie pour l’océan entre 50 et 8,000 mèt. ; pour la Manche, entre 10 et 180 mètres, et pour la Méditerranée, entre 300 et 4,275 mètres. Près du littoral, elle est d’autant plus grande que les côtes sont plus abruptes.