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Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 61.djvu/182

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La plupart des autres poissons, soles, turbots, limandes, muges, mulets, etc., sont pêchés à peu de distance des côtes au moyen de bateaux pontés ou non, suivant qu’on s’en éloigne plus ou moins. Les pêches du large sont généralement plus fructueuses que celles du littoral, mais elles exigent un outillage plus perfectionné. Sous ce rapport, nos pêcheurs auraient beaucoup à apprendre des Norvégiens ou des Hollandais. Entre autres pratiques qu’ils pourraient leur emprunter, il faut mentionner l’usage du vivier, qui permet de conserver le poisson en vie jusqu’au moment de la vente ; et l’habitude qu’ils ont d’avoir des filets uniformes, de façon à pouvoir les réunir, tandis que nos marins, qui en ont de toute forme et de toute dimension, sont obligés de pêcher isolément. Grâce à cet usage de pêcher en commun, les bateaux norvégiens ne sont pas forcés de rentrer au port quand leur chargement est complet et peuvent garder la mer tant que la pêche est fructueuse. Des bateaux spéciaux bons marcheurs viennent journellement recueillir le poisson pris et le transportent sur. le marché, où il est immédiatement vendu. C’est un grand avantage pour les pêcheurs, qui ne perdent pas de temps en allées et venues et qui livrent à la consommation une marchandise en parfait état de fraîcheur.

Nos pêcheurs font usage de différentes espèces d’engins, dont l’un, des plus employés, est un filet du poids de 65 kilogrammes, qui, dans la Manche et l’océan, prend le nom de chalut. C’est une bourse de 15 mètres environ d’ouverture et d’une égale profondeur qu’on fait traîner au moyen d’une corde avec la vitesse que peut imprimer le vent à un bateau couvert de voiles. On a une idée de l’énergie de cet appareil quand on voit dans les ports des ancres de navires abandonnées, ramenées par le chalut. Il ramasse ainsi tout ce qu’il rencontre, coquillages, poissons, frai, et est considéré comme très destructeur ; aussi n’est-il généralement permis qu’au large, c’est-à-dire à plus de 3 milles des côtes. Dans la Méditerranée, on se sert d’un filet traînant appelé bœuf, qui se compose de deux ailes et d’une poche, qu’on remorque avec deux bateaux a voile ou à vapeur. Ce filet, qu’on ne peut employer qu’en pleine mer, à 10 ou 15 brasses de profondeur, est moins désastreux que le gangui, qui, comme le chalut, est retenu par des poids et laboure le fond en détruisant tout sur son passage.

La pêche à pied se fait soit au moyen de filets à main, avec lesquels on fouille, à marée basse, les anfractuosités des rochers ; soit au moyen de filets verticaux qu’on tend parallèlement au rivage et que l’eau recouvre au moment du flux, en les laissant à sec au reflux avec les poissons qu’elle y a apportés.

Dans la Méditerranée, on se sert spécialement, pour la pêche du thon, de madragues : ce sont des filets fixes, tendus verticalement