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Page:Séché - Les Muses françaises, I, 1908.djvu/37

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christine de pisan


Princes d’amour me fait desver[1],
Quand il me dit qu’il est tout mien.
De douceur me fera crever ;
Et certes le doux m’aime bien !


LE DIT DE LA PASTOURE


FRAGMENTS


. . . . . . . . . . . . . . . .


Pastoure suis qui me plains
En mes amoureux complains,
Conter veux ma maladie,
Puisqu’il faut que je le die.
Comme d’amours trop contrainte.
Par force d’aimer étrainte,
Dirai comment je fus prise
Étrangement par l’emprise
Du Dieu qui les cœurs maistroie[2],
Et qui bien et mal octroie.


. . . . . . . . . . . . . . . .


Là en l’ombre m’asseyais
Sous un chêne, et je m’essayais
A ouvrer de fils de laine.
En chantant à haute haleine ?
Ceinturettes je faisoie.
Ouvrées comme ce fut soie ;
Ça je laçais des coiffettes
Gracieusètement faites,
Bien tissues et entières ;
Ou raisiaux, ou panetières
Où l’on met pain et fromage.
Là sous le chêne ramage
S’assemblaient pastourelles
Et non mie tout par elles ;
Ainsi voyiez, soir et matin[3],
Son ami parmi la main

  1. Perdre le sens, devenir folle.
  2. Qui est le maître des cœurs.
  3. Pour matin